Lucarne Opposée
·4 avril 2023
Lucarne Opposée
·4 avril 2023
La phase de groupes de la Copa Libertadores 2023 est sur le point de débuter. Son guide est donc à déguster avant de se plonger dans les rencontres.
Trente-deux candidats, seize premiers élus. La phase de groupes de la Copa Libertadores 2023 débute cette semaine avec une grande question : quelqu’un parviendra-t-il en empêcher celle-ci de se transformer en nouvelle édition continentale de la Coupe du Brésil. Les dés sont jetés, place désormais au grand spectacle avec, pour certains groupes, de gros dégâts en perspective.
Vainqueur en 2019 et 2022, finaliste 2021, Flamengo est naturellement un candidat au titre 2023. Cette évidence est appuyée par la présence d’un effectif toujours aussi dense en termes de qualité et qui ne cesse de se renforcer (voir le retour de Gerson, les arrivées d’Ayrton Lucas et la future d’Agustín Rossi) tout en conservant sa base déjà assez folle. Mais il est un paramètre cependant à prendre en compte à l’heure d’aborder la campagne de Libertadores, il se nomme Vítor Pereira. Le Portugais sort d’une saison plutôt décevante au vu de l’effectif avec Corinthians et entame 2023 d’une manière plus que mitigée. Flamengo a ainsi été privé de finale de Coupe du Monde des Clubs, dépassé par Al-Hilal en demies et sauvant d’un rien sa troisième place ; s’est incliné en Recopa Sudamericana, totalement dépassé à l’aller par Independiente del Valle et incapable de totalement retourner le match au retour ; s’est incliné en Supercoupe du Brésil face à Palmeiras. La victoire du week-end en finale aller du carioca face au rival Fluminense pourrait avoir donné un peu d’oxygène, mais le début d’année est encore très chancelant.
La chance de Flamengo est de disposer d’un groupe dans lequel il va certes croiser une bête noire, mais aussi et surtout deux novices. Premier des deux, Aucas. Le champion d’Équateur a déjà été largement présenté dans le guide de la saison équatorienne, nous ne reprendrons pas ici tout ce qui a été dit et renverrons le lecteur vers cet article. Il n’empêche que pour ses débuts en phase de groupes de la Libertadores, César Farías dispose d’un groupe expérimenté et intelligemment construit pour faire face à cette épreuve et venir remplir le rôle de trouble-fête qui semble lui convenir à merveille. L’ouverture prévue à Quito face à l’ogre brésilien devrait donner le ton, mais el Ídolo peut clairement aspirer à jouer au minimum la troisième place. D’autant que cette expérience, l’autre novice n’en dispose pas d’autant. Sa première en Libertadores, le Ñublense de Jaime García la doit à une campagne historique en championnat 2022 qui a vu les Diablos Rojos chiliens lutter pour le titre avec Colo-Colo. La recette a été simple et parfaitement appliquée : un bloc difficile à transpercer et une belle efficacité offensive. Jaime García n’a pas bousculé son groupe, a rajouté quelques éléments plus expérimentés, et espère ainsi un beau parcours continental, avec pourquoi pas une troisième place que le club espère disputer avec Aucas.
Reste enfin la « bête noire » du Mengão, Racing. Après avoir lutté pour le titre de champion d’Argentine l’année passée, la Academia s’est adjugé le Trophée de Champions et la sulfureuse Supercopa Internacional face à Boca. L’effectif n’a pas été trop chamboulé, les hommes de Gago ont connu un début de championnat difficile, mais sont de retour dans la course au titre au meilleur des moments. Certes, Racing a perdu son dynamiteur Johan Carbonero sur blessure, mais les excellentes prestations de Rojas et les bons débuts de l’expérimenté Paolo Guerrero donnent de l’espoir au peuple albiceleste. D’autant plus que le groupe n’est pas si corsé. Le duel contre Flamengo devrait faire office de baromètre pour la première place du groupe. À ce petit jeu, avantage Rubo-Negro puisque le match retour entre les deux se déroulera au Maracanã. Toutefois, il est important de rappeler que Racing reste Racing : les matchs pièges seront ceux contre les « petits » de ce groupe.
En Amérique du Sud, le poids de l’histoire joue un grand rôle, en particulier dans le placement dans le chapeau 1, celui des têtes de séries. Mais si l’Uruguay semble à la peine en Libertadores, Nacional ne s’appuie pas uniquement sur son statut de géant pour y figurer. Quart de finaliste de la dernière Sudamericana, de la Libertadores 2020, huitième de finaliste de la Sudamericana 2021, de la Libertadores 2019, le Bolso est donc habitué à sortir de son groupe. Comme évoqué dans le guide du championnat uruguayen, le club a beaucoup perdu durant le mercato mais subit surtout un début d’année totalement raté. L’ère du Ruso Zielinski s’est terminée quasiment aussi vite qu’elle a commencé (huit matchs), Álvaro Gutiérrez est revenu sur un banc qu’il connait bien mais la mayonnaise n’a pas encore totalement prise, la défaite lors du clásico le confirmant. C’est donc un Nacional en convalescence qui arrive sur la ligne de départ de la Libertadores. Sa chance ? Disposer d’un groupe dans lequel ne se présente qu’un seul véritable grand danger, l’Inter, qu’il affrontera le mois prochain.
L’Internacional et ses deux étoiles qui remontent à 2006 et 2010 qui se présente comme vice-champion du Brésil 2022. Sans faire de bruit, le Colorado de Mano Menezes s’est appuyé sur une forteresse imprenable, le Beira-Rio (une seule défaite en championnat) et sur un collectif parfaitement huilé, sans grande star, mais avec de l’expérience à chaque ligne : en défense avec l’arrivée de Mário Fernandes qui vient s’ajouter aux Renê et autre Gabriel Mercado, au milieu avec Alan Patrick ou encore en attaque avec Luiz Adriano et Pedro Henrique. Il sera donc l’un des prétendants aux deux premières places et devrait être redoutable dans son rôle du Brésilien que personne n’attend véritablement.
Derrière ce duo, la vie s’annonce plus difficile pour le DIM et Metropolitanos. Ce dernier, champion du Venezuela 2022 permettra de suivre l’évolution du vainqueur du trophée Lucarne Opposée au dernier Tournoi Maurice Revello, Andrés Ferro, mais devrait évidemment souffrir pour ses grands débuts dans la plus belle des compétitions. Quand à l’un des deux représentants colombiens, déjà satisfait d’arriver en phase de groupes, le souvenir de la demi-finale 2003 est encore lointain. Incapable de sortir de son groupe de Sudamericana l’an passé, finissant derrière un Internacional qui l’avait battu à l’aller comme au retour sans encaisser le moindre but, et les modestes paraguayens de Guaireña, envisager sortir de ce groupe s’annonce présomptueux, la troisième place lui semblant cependant promise.
Il est des « groupes de la mort » qui ne disent pas véritablement leur nom. Habitué aux premières phases assez tranquilles, l’ogre Palmeiras devrait cette fois avoir a montrer les crocs dès le coup d’envoi tant le Groupe C qui lui a été offert s’annonce périlleux.
Il y aura d’abord Barcelona. Pour leur cinquième participation consécutive, la vingt-neuvième de l’histoire, les Toreros, habitués à chasser les géants, s’étaient hissés en demi-finale il y a deux ans, sortant premier d’un groupe partagé avec Boca, Santos et The Strongest, éliminant ensuite sur leur route Vélez et Fluminense. Autant dire que s’il y a une formation à ne pas prendre à la légère dans ce groupe, ce sont bien les représentants équatoriens. Finaliste du dernier championnat, Barcelona a musclé son effectif (on oriente une fois encore le lecteur vers le le guide de la saison équatorienne) et si le début de saison est plutôt chaotique au pays, reste un adversaire redoutable dès lors que les projecteurs internationaux se braquent vers lui. Il est en tout cas un réel candidat à la deuxième place.
À ses côtés, le Cerro Porteño a déjà vécu sa crise annuelle et a donc pu enclencher la marche avant depuis l’arrivée de Facundo Sava sur son banc. Le Ciclón paraguayen a certes connu un énorme accident juste avant d’ouvrir sa campagne de Libertadores (0-5 face à Libertad), mais a déjà réussi le tour de force de sortir un club brésilien de l’épreuve, Fortaleza, battu à l’aller et au retour. De quoi offrir un surplus de confiance à un effectif suffisamment armé pour prétendre à lutter pour la deuxième place. Bolívar vient donc compléter un trio bien décidé à pourrir la vie de Palmeiras. Le club bolivien le mieux géré du pays a décroché sa place en groupes avec une victoire lors de l’Apertura 2022 et un large succès en finale face à The Strongest, survolé la table annuelle (sept points d’avance sur les Atigrados, quatre-vingt-quatorze buts inscrits en quarante matchs) et espère revivre les glorieux parcours du passé, notamment l’incroyable épopée 2014 (demi-finale). Pour y parvenir, la Academia peut compter sur un entraîneur talentueux, l’Espagnol Beñat San José, déjà titré avec l’institution mais aussi à la Católica chilienne mais qui, étrangement, n’a jamais dirigé la moindre rencontre de Libertadores, et quelques noms bien connus des habitués du continent : Carlos Lampe dans les buts, Luis Haquín et Diego Bejerano en défense, Moisés Villaroel, Ramiro Vaca, Fernando Saucedo, Leonel Justiniano au milieu, Ronnie Fernández en attaque. Le groupe est lui aussi suffisamment armé pour chercher à lutter pour la deuxième ou troisième place, même si pour cela, il faudra s’appuyer une fois encore sur une invincibilité totale à La Paz, souvent contestée ces dernières années, et aller chercher des points en déplacement, grande difficulté des clubs boliviens.
Si tout ce petit monde devrait lutter pour la deuxième place, c’est donc qu’il y a un ogre dans ce groupe. Vainqueur en 2020 et 2021, demi-finaliste 2022, champion du Brésil sans aucune contestation possible l’an passé, Palmeiras est le grandissime favori au titre 2023. Le groupe d’Abel Ferreira est quasi inchangé, même si le départ de Gustavo Scarpa fait partie des départs notables, et 2023 devrait être l’année de la suite de l’éclosion de l’immense Endrick. Rien ne semble en tout cas capable de venir perturber la marche en avant d’un Verdão toujours aussi dense et impressionnant qui s’est déjà offert Flamengo en finale de la Supercoupe du Brésil et écrase un Paulista dont la première défaite en quinze matchs est venue en finale aller face à Água Santa sur un but concédé à la 92e minute. Pas de quoi non plus plonger le club dans la crise.
En s’imposant au Monumental en mai 2021, Fluminense avait chipé la première place du groupe à River Plate avant de tomber en quarts de finale face à Barcelona. Deux ans plus tard, les deux équipes se retrouvent avec le costume de favori du groupe qu’elles partagent et ont changé d’ère, l’an passé pour Fluminense, cette année pour River. Le Flu a donc accueilli Fernando Diniz, sorte de beautiful loser sauce auriverde jusqu’ici. Car cette fois, les choses ont changé. Fernando Diniz sort de ce qui est certainement la meilleure saison de sa carrière, mettant en place son jeu caractéristique basé sur la possession et les passes, sans cette fois s’écrouler au cours de la saison comme ce fut souvent le cas lors des années précédentes. Et son Flu est séduisant, convaincant, performant. Troisième du dernier championnat, Fluminense avait échoué en groupes de la Sudamericana l’an passé en ne parvenant pas à vaincre Unión même s’il avait réussi sa sortie en passant dix buts à Oriente Petrolero en clôture. Pour 2023, on retrouve les éléments clés de la réussite du Flu, notamment la machine à but Germán Cano et s’offre un recrutement des plus intéressant avec les arrivés des expérimentés Marcelo et Keno ou du prometteur Guga pour densifier un effectif déjà bien solide.
Leader du championnat au moment de débuter la Copa Libertadores, l’équipe dirigée par Demichelis semble enfin s’être mise au diapason. Si River n’est pas tombé dans un groupe facile, il s’agit sans aucun doute de l’équipe argentine la plus apte à aller loin de ce tournoi. Au fur et à mesure des matchs de championnat, le Millo a réussi à corriger ses errances défensives. Malgré les recrutements en fanfare de Borja et Rondón, c’est bien Beltrán qui tient d’une main de fer l’attaque riverplatense. Que les choses soient claires, ce River-là est très différent de celui de Gallardo. Plus équilibré certes, mais parfois sans saveur. Lors des matchs difficiles cette saison (que l’on peut compter sur les doigts d’une main), la banda roja n’a pas vraiment été convaincante. Le duel face à un séduisant Fluminense, rival difficile historiquement, sera d’autant plus intéressant. Le calendrier est également favorable puisque le club de Nuñez recevra dans son antre les deux derniers matchs de groupes, face à Flu et The Strongest. L’effectif de River est le plus intéressant d’Argentine et devrait se voir renforcé par le retour de blessure de Kranevitter. La gestion de forme du si indispensable Enzo Perez (trente-sept ans) sera également un facteur important. Nacho Fernández, parfois irrégulier, semble ne jamais être parti, ce qui est d’excellent augure pour le peuple rojiblanco. La première place de ce groupe est l’objectif principal.
Attention cependant à ne pas enterrer les deux autres membres du groupe trop rapidement. Déjà car un déplacement à La Paz est toujours compliqué quand il s’agit de défier The Strongest, qui n’a perdu qu’un seul de ses dix derniers matchs de Libertadores à la maison – face à Boca en 2021 – et qui réussit un début de saison quasi parfait au pays (seize points sur dix-huit possibles dont une victoire lors du clásico face à Bolívar). L’équipe est aussi dirigée par un entraîneur espagnol, Ismael Rescalvo, passé un temps par Independiente del Valle et vice-champion d’Équateur en 2021 avec Emelec avec qui il avait manqué d’un rien la qualification en huitièmes de finale de la Sudamericana la même année, perdant lors de la dernière journée face à un Talleres pourtant déjà éliminé et laissant donc filer le futur finaliste RB Bragantino. Reste à savoir si les Atigrados parviendront à prendre des points en déplacement, eux qui restent sur six ans sans victoire loin de leurs terres en Libertadores, soit dix-huit matchs. Il faudra cependant s’accrocher car le dernier membre du groupe a tout de l’équipe contre laquelle les points vont valoir cher. Meilleure équipe à la table annuelle 2022, le Sporting Cristal a installé Tiago Nunes sur son banc et s’est muée en équipe ultra-spectaculaire, capable de déjouer les pronostics (demandez à Huracán ou au Nacional paraguayen, seule formation à avoir fait tomber les Celestes avant d’être balayée au retour). Le Sporting Cristal a tout du profil de l’empêcheur de tourner en rond et dans sa lutte pour la troisième place, pourrait aussi coûter des points aux deux favoris annoncés et ainsi, qui sait, les mettre dans un équilibre précaire.
Est-il nécessaire de présenter encore Independiente del Valle au lecteur de Lucarne Opposée ? Finaliste de la Libertadores 2016, vainqueur de la Sudamericana 2019 et 2022, vainqueur de la Recopa Sudamericana 2023, IdV est devenu une référence sur le continent, LE club équatorien que chacun souhaite éviter en phase de groupes tant le danger est permanent. Là encore, on renverra le lecteur vers le guide de la saison équatorienne s’il souhaite plus de détails sur l’équipe actuelle. Une formation de Martín Anselmi qui a surpris le continent en ajoutant à son groupe un habitué du continent, Marcelo Moreno Martins, dont l’apport offensif devrait être indéniable. Tête de série de son groupe, IdV n’aura cependant pas la vie facile, le Groupe E étant sans aucun doute l’un des plus relevés de l’épreuve. Mais le voyage à Sangolquí sera évidemment source de bien des dangers, une seule équipe étant parvenue à s’imposer face aux Negriazules depuis leur arrivée en Libertadores en 2014, c’était Palmeiras en 2021.
Mais la concurrence s’annonce rude. À commencer par un géant brésilien, Corinthians, quart de finaliste l’an passé et dont le meilleur recrutement pourrait être sur le banc avec le départ de Vítor Pereira et l’arrivée à sa place de l’ancien analyste vidéo de Tite, Fernando Lázaro. Ce dernier n’a perdu que deux matchs sur les vingt qu’il a dirigés avec le Timão, même si l’élimination en quarts du Paulista pèse, et dispose d’un effectif taillé pour aller loin dans cette compétition avec un joli mélange d’expérience (Cássio, Renato Augusto, Gil, Fabián Balbuena, Fábio Santos, Fagner, Junior Moraes) et de jeunesse (Bruno Méndez, Fausto Vera, Roni, Yuri Alberto, Giovane). De quoi aborder ce groupe dans un costume de favori, malgré un tirage des plus relevé.
Dans les pas du Corinthians, un autre ancien vainqueur. Certes, Argentinos Juniors a remporté la plus belle des compétitions en 1985, mais il ne s’agit-là que de sa cinquième participation à l’épreuve, la première depuis l’élimination en huitièmes de finale par River en 2021. Auteur d’un bon début de saison en championnat, Argentinos a beau être sans cesse pillé puis renouvelé par Gabriel Milito, le Bicho est toujours aussi séduisant, même s’il connait souvent des difficultés dans la finition, principalement à l’extérieur. Un paramètre qui pèsera dans la balance dans l’optique de se qualifier pour les huitièmes de l’épreuve même si la troisième place du groupe apparaît comme étant un objectif plus abordable pour les pensionnaires du Diego Armando Maradona. Bien que le dernier match de groupe (qui pourrait être décisif) se jouera à Quito, AAAJ recevra Corinthians et Liverpool des deux premières journées de la phase retour, ce qui pourrait lui permettre de faire la différence tant il est difficile d’aller jouer sur ce petit terrain, avec des tribunes en fusion.
Il faudra bien cela car le dernier larron du groupe n’est sans doute pas le plus prestigieux, il n’en demeure pas moins redoutable. Vainqueur de l’Intermedio 2019, la Supercopa 2020 et le Clausura 2020 et l’Apertura 2022 et la Supercopa 2023, Liverpool s’est ainsi confortablement installé dans le paysage local, perdant la finale du dernier championnat contre Nacional et mise comme toujours sur la créativité pour sortir d’une phase de groupes qu’il dispute pur la première fois. Suivre Liverpool permettra ainsi de suivre l’évolution de Luciano Rodríguez, l’une des révélations uruguayennes du Sudamericano U20, mais aussi de plusieurs joueurs de qualité du championnat uruguayen depuis dix ans. Reste à savoir si dans un tel groupe, cela peut passer.
S’il est un géant qui s’offre un groupe dit facile, c’est bien Boca. Seul souci pour celui qui aspire toujours à détrôner le Rey de Copas argentin, il aborde la compétition de la pire des manières. À la dérive totale, Boca commence cette nouvelle édition de Copa Libertadores avec un entraineur intérimaire. Le problème côté Xeneize, c’est que l’intérimaire reste en poste plusieurs mois jusqu’à éviction avant d’être remplacé par l’entraîneur de la réserve et d’initier le même cycle. Boca n’a pas d’entraineur expérimenté depuis le départ de Russo en août 2021. Cette fois-ci, le si fameux Consejo del Fútbol a promis quelqu’un d’expérimenté. Sauf que Martino a dit non, que Pekerman ne semble absolument pas adapté à Boca et qu’il ne reste ainsi plus grand monde sur la liste. Ce qui est sûr, c’est que Boca dispose d’un groupe de joueurs correct, mais plutôt capricieux. Sans aucune idée de jeu depuis le départ de Battaglia en juillet dernier, les dirigeants xeneizes ont au moins eu l’intelligence de licencier Ibarra (qui n’avait même pas été prolongé officiellement) juste avant l’épreuve. Dans un groupe accessible, les Bosteros devraient assez logiquement prendre les devants si certains des référents ont envie de jouer. Il est néanmoins difficile de faire des prédictions tant le futur est incertain sur les rives du Riachuelo. Seule certitude, Boca reste Boca, et en compétition internationale, personne ne souhaite l’affronter.
La chance de Boca est que face à lui se présentent un néophyte sans grand espoir, un club vénézuélien peu habitué à la lumière et un géant en crise. Le néophyte n’est autre que le champion de Colombie en titre : le Deportivo Pereira. Un champion qui, comme nous l’évoquions dans le guide de la saison colombienne, s’est totalement fait piller, n’a gagné que trois de ses onze matchs de championnat, et ne peut donc prétendre à grand-chose dans une compétition dont la seule présence en groupes est déjà la récompense. Pereira devrait donc se battre pour la troisième place avec Monagas, dont ce n’est que la deuxième présence en phase de groupes après la dernière place en 2018 et au sein duquel on scrutera avec attention la pépite David Martínez et où l’on suivra la suite de la carrière du remuant Abdiel Arroyo. Reste donc l’autre géant en crise, Colo-Colo. Champion du Chili l’an passé avec onze points d’avance et une saison totalement maîtrisée, le Cacique de Gustavo Quinteros s’est depuis totalement effondré. Certes il y a eu des départs importants, du capitaine Gabriel Suazo au buteur Juan Martín Lucero, mais la chute de performance est assez inexplicable, qu’elle soit individuelle ou collective. Comme si quelque chose s’était brisé. Alors Colo-Colo navigue en eaux troubles, peine à avancer en championnat, ayant ainsi perdu près de la moitié de ses matchs, et espère lancer sa saison avec la Libertadores. C’est oublié que le champion 1991, dont les retrouvailles avec Boca vont raviver quelques fantômes du passé, ne réussit guère ces dernières années sur le continent avec un quart de finale de Libertadores en 2018 et un huitième de Sudamericana l’an passé comme seuls moments de gloire depuis 2007.
Quand vous tirez deux clubs brésiliens dans votre groupe, vous savez que la situation est mal embarquée. Mais quand, en plus ces deux clubs sont le finaliste 2022 et l’un des prétendants en 2023, l’affaire se corse. Tel est donc le destin réservé à Alianza Lima et Libertad.
Sur le papier pourtant Péruviens et Paraguayens ont des armes à faire valoir. L’Alianza Lima, qui vise le tricampeonato au Pérou, tourne à plein régime en championnat, n’ayant perdu qu’un seul match sur le terrain, mène la danse, et peut s’appuyer sur un groupe doublement titré mais aussi renforcé par des joueurs d’expérience comme Carlos Zambrano derrière ou Gabriel Costa et Christian Cueva devant pour ne citer qu’eux. Seul problème, dès lors qu’il s’agit de Libertadores, les choses se compliquent. Car au-delà du 1-8 reçu au Monumental l’an passé en clôture de son groupe, l’Alianza Lima n’a gagné aucun de ses vingt-neuf derniers matchs disputés dans l’épreuve (cinq matchs nuls dans la série), la dernière victoire ayant désormais plus de dix ans. Autant dire que les ambitions sont mesurées. Côté Libertad, les chances sont sans doute plus grandes. Comme l’Alianza, le Guma domine son championnat, Libertad sort d’un 5-0 passé en une mi-temps au Cerro Porteño et a pris vingt-cinq points sur trente possibles. Mais surtout, Libertad sait gérer les Brésiliens. L’an passé, le Guma était déjà dans le groupe de l’Athletico Paranaense et avait remporté ce groupe, s’imposant notamment chez lui face au futur finaliste avant de tomber de nouveau sur lui en huitièmes de finale, pour un but. On aura donc droit aux matchs cinq et six en deux ans dans cette série et une nouvelle occasion pour les Paraguayens de prendre leur revanche.
L’affaire parait donc tout de même compliquée. Comme écrit quelques lignes auparavant, les deux Brésiliens du groupe s’annoncent des plus solides. Après sa victoire en Sudamericana 2021, la deuxième en quatre ans, l’Athletico Paranaense s’est ainsi hissé en finale de la dernière édition, tombant face à Flamengo et a vu Luis Felipe Scolari prendre sa retraite. Reste que le club a misé sur la continuité en faisant confiance à celui qui fut l’adjoint de Felipão pendant six ans, Paulo Turra. Une confiance qui pour l’instant porte ses fruits, le Furação est encore invaincu dans son championnat d’état (quinze victoires, un nul), ayant remporté la finale aller et arrive donc en pleine confiance. Un Furação au sein duquel on suivra évidemment avec attention l’évolution de Vitor Roque, l’un des hommes clés du titre brésilien lors du dernier Sudamericano U20. L’autre club brésilien est donc un outsider nommé Atlético Mineiro. Pas de continuité cependant du côté du Galo puisque le Chacho Coudet s’est installé sur le banc d’un groupe séduisant sur le papier, bien trop inconstant sur le terrain en 2022, à l’image de sa star offensive, Hulk. Difficile cependant pour l’instant de voir une véritable montée en puissance tant ce Galo semble toujours aussi inconstant. Certes le travail est fait : finale du campeonato mineiro (avec victoire à l’aller arrachée face à l’América 3-2 à la 97e), qualification pour la phase de groupes après avoir sorti Millonarios sans briller, mais il faudra évidemment monter en puissance pour espérer un vrai parcours dans l’épreuve. Ce groupe peut lui permettre, même si la réception de Libertad pour l’ouvrir a tout du piège parfait.
Dernier groupe de ce casting, le seul avec le F sans aucun club brésilien. Et donc un groupe où tous les espoirs sont permis. Tous ? Pas sûr. Actuellement en seconde division d’Argentine, Patronato est certainement l’équipe la plus faible de cette phase de groupes. Depuis la Copa Argentina remportée face à Talleres en novembre dernier, il ne reste plus grand-chose du Patrón de Paraná, équipe reléguée en raison des promedios qui ont sanctionné les campagnes antérieures. Facundo Sava est parti au Paraguay, Walter Otta s’installe sur le banc. Son nom ne vous dit rien ? C’est normal. Ancien entraineur d’Estudiantes de Buenos Aires, qui aurait mérité de gagner le barrage face à Instituto si l’arbitrage n’avait pas été catastrophique, Otta a surtout dirigé dans les divisions inférieures, remportant la Primera C en 2012 avec Vila Dálmine et la Primera B en 2017 avec le Deportivo Morón. Pas de quoi faire naître quelques frissons sur le continent. Malgré tout, Patronato peut s’estimer heureux. Certes, le groupe est composé de deux anciens vainqueurs de la Libertadores, mais ce ne sont pas les équipes les plus fortes du continent à l’heure actuelle. Il ne faut cependant pas se faire d’illusion, une troisième place synonyme de barrage pour la Sudamericana serait déjà extraordinaire pour une équipe à la peine en seconde division (onzième après neuf journées et deux petites victoires à son actif) et dont l’objectif principal de la saison et de remonter. L’espoir se nomme « vitrine », en effet, les joueurs auront certainement à cœur de se montrer sous leurs meilleurs jours. Du côté de Melgar, la situation est moins catastrophique, mais guère plus joyeuse. Vice-champion 2022, le Dominó n’a toujours pas gagné le moindre match en 2023 et pire, n’a inscrit qu’un seul but en sept sorties, ce week-end. Autant dire que la Libertadores n’est qu’un moyen de penser à autre chose, de lancer véritablement la saison, Mariano Soso, arrivé au chevet du club le 20 mars dernier devant trouver la formule après avoir signé trois nuls, les trois seuls points du club en championnat.
Les espoirs sont donc plutôt à chercher parmi les deux grands favoris du groupe. À commencer par Olimpia, qui peut être considéré comme le favori du groupe. Le Decano paraguayen a lui aussi connu sa première crise de l’année, nommant Diego Aguirre à son chevet mais ne semble pas encore totalement guéri. Malgré tout et après une campagne 2022 qui s’annonçait tout aussi abordable (dans un groupe qu’Olimpia partageait avec Colón, Cerro Porteño et Peñarol – sans brésilien donc) mais qui s’est terminée éliminé par un modeste brésilien en Copa Sudamericana (aux tirs au but après avoir pourtant gagné 2-0 à la maison à l’aller), le géant continental paraguayen doit sortir de ce groupe, s’appuyant sur un effectif suffisamment armé pour y parvenir et le poids d’une histoire déjà riche : Olimpia a décroché trois Libertadores et est le seul club du continent à avoir disputé au moins une finale lors de chaque décennie. Reste enfin le cas de l’Atlético Nacional. Doublement titré, la dernière fois en 2016, le club verdolaga doit vivre avec de fortes tensions entre ses dirigeants et ses supporters, un début d’année sans grandes émotions mais pas forcément raté non plus (actuellement cinquième à trois points du leader avec une seule défaite en onze journées) et marqué par des attentes de retour de blessure, notamment pour Kevin Mier, Jarlan Barrera et Jhon Solís. Reste que la bande à Paulo Autuori joue déjà gros dans un mois d’avril de tous les dangers et dans un tel climat d’instabilité pourrait vite partir dans une nouvelle crise en cas de départ tout aussi moyen en Libertadores. Alors, les espoirs des deux appelés à être condamnés pourraient renaître.