Stats Perform
·22 février 2019
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·22 février 2019
C'est dans un rôle de doublure que Bobby Allain a entamé sa campagne en Ligue 1. Plus de six mois plus tard, l'ancien portier du Red Star a été propulsé numéro 1 à son poste. Sa saison étonnante ressemble à son parcours. D'un ton posé, la nouvelle coqueluche du public dijonnais nous a raconté son histoire, sa trajectoire et son approche du métier.
Bobby Allain : À titre collectif, cette saison est mitigée parce qu'elle a très bien commencé avant une période creuse. Il y a une belle équipe, de très bons joueurs, le président a réussi à garder la majorité des joueurs... (il réfléchit, ndlr). C'est difficile de mettre des mots sur ce qu'il se passe. Après personnellement, oui j'ai été propulsé numéro 1. J'ai eu un match et il fallait saisir sa chance et je pense que je l'ai fait. Espérons que ça continue.
Il est hors du commun parce que je n'ai pas fait de centre (de formation, ndlr). J'ai fait des essais dans des clubs, ils me jugeaient trop petit, ou pas du même niveau que les gardiens qu'ils avaient dans leur centre. Et j'ai dû me débrouiller dans la région parisienne pour faire les clubs "phares" d'Ile-de-France. J'ai fait Montrouge, j'ai fait l'ACBB (Athletic Club de Boulogne-Billancourt). J'allais signer en DH à Créteil puis je suis parti faire un essai en Écosse, en deuxième division écossaise, et là j'ai été pris. Ça a été mon premier club professionnel.
Oh oui... ils retiennent mon nom, même mon prénom. Et je reçois aussi beaucoup de messages sur les réseaux sociaux, j'essaie de repondre à tout le monde. Après il ne faut pas trop y prêter attention, le plus important c'est le club. Je suis focalisé sur la situation actuelle et je mets toute mon énergie là-dedans.
Pas encore. Si ça peut rester comme ça... (rires).
Je pense que oui. Mon père était passionné de foot depuis son plus jeune âge et rêvait d'être footballeur professionnel mais n'a pas réussi à cause de son handicap. Donc il s'est vu à travers moi. Il s'est dit : 'toi tu as la chance d'être entendant, tu peux réussir donc donne tout ce que t'as et ne regrettes pas pour jouer un jour en Ligue 1.
C'est ça. C'est une langue. Ils se sont battus longtemps pour. Elle a été bannie pendant longtemps, les sourds ne pouvaient pas communiquer entre eux, et elle a été autorisée dans les années 2000 si je ne me trompe pas. Il faut se battre et faire attention aux termes utilisés - c'est la langue des signes - et puis on associe aussi muet à sourd alors que c'est faux. Les sourds s'expriment, c'est juste qu'il y en a qui ne le souhaitent pas, d'autres qui le souhaitent. Il y en a qui travaillent avec les orthophonistes dès qu'ils le peuvent. C'est du cas par cas.
Petit j'étais très, très fan de Buffon. C'est un style un petit peu à l'ancienne, sur sa ligne avec des parades exceptionnelles. Maintenant c'est Ter Stegen, qui est un gardien très moderne avec un excellent jeu au pied, qui joue très haut, qui coupe des trajectoires... On ne se rend pas compte quand on est téléspectateur ou realisateur mais quand il coupe une action, on ne voit pas la suite de l'action parce qu'il l'a annulée et ça c'est très impressionnant.
Je ne suis pas trop le genre de joueur à demander un maillot mais là je crois que c'est la seule personne à qui je vais le faire (rires).
Pour le point fort je dirais peut-être le domaine aérien. C'est un aspect qui me plaît beaucoup. Par contre, mon jeu au pied est perfectible.
C'est exactement ça. Je pense que Neuer a initié tout ça il y a quelques années. C'est impressionnant de couper les trajectoires comme ça, les contre-attaques rapides. Ça met un terme à l'action rapidement et ça permet au bloc de se replacer, aux défenseurs de les soulager. Ça fait trois, quatre ans que les gardiens modernes sont aussi des libéros. Ils sont poussés à être haut. Après pour le but que je prends (du Nîmois Téji Savanier, ndlr), pour moi je me dois de la sortir...
Oui mais je ne peux pas me dire ça... (sourire). Je suis plutôt dans l'analyse vidéo à revoir mon placement pour faire en sorte que ça ne se répète pas.
Je pense que je vais parler au nom de tous les gardiens : on est très, très solidaires. Ce qui lui arrive sur le terrain, on se dit que ça peut nous arriver à nous. Donc forcément on va toujours le reconforter, lui parler, le pousser à l'entraînement. Après, certes, on va se dire à l'entraînement : 'd'accord, pour ça il faut que je fasse ça pour me démarquer, pour sortir du lot'. Donc je vais bosser les points qu'on voit - ses hauts et ses bas comme vous dites, au niveau des matches - pour faire en sorte de le pousser lui et qu'on progresse tous les deux.
Au vu du poste il le faut, je pense. Je l'ai appris avec le temps parce que je ne le faisais pas avant. Je l'ai travaillé en réserve. Vu que j'étais un petit peu plus âgé, c'est le coach qui me disait qu'on m'écoutait quand je prends la parole. Et c'est vrai qu'en venant ici je pensais qu'il fallait avoir une légitimité en ayant plusieurs matches en Ligue 1 pour prendre la parole dans le vestiaire etc etc... Et c'est l'entraîneur-adjoint David Linarès que j'avais avec la réserve qui est venu me voir et m'a dit : 'tu peux parler, tu vas être écouté'. Donc j'essaie de mettre ça en place petit à petit, je ne sais pas si je suis écouté. Il faut demander aux joueurs (rires). En avant-match ou à la mi-temps, je ne sais pas, peut-être...
Se dire les choses, oui, je pense. C'est peut-être une solution pour avancer, relever la tête et pouvoir être bons mentalement. C'est surtout ça.
Comme tout le monde j'ai été un petit peu surpris. Mais après il faut vite réagir et s'adapter, on est des professionnels.
Non, non, bizarrement on le sent tout de suite, dans les jeux... Certes quand on rejoint le groupe il y a des consignes, c'est nouveau, il faut les assimiler. Mais nous aussi quand on a nos habitudes et que le coach vient nous voir et nous dit : 'il faut mieux que tu changes ça'. Là on le ressent tout de suite.
Jusqu'à maintenant j'ai trouvé Khazri très bon, dans ses déplacements, ses appels.
Ouais, ouais. Pour l'instant, ouais... (sourire).
Déjà maintenir le DFCO en faisant le plus de matches possibles, en étant le plus décisif possible et en essayant de ramener le plus de points. Pour l'instant c'est à court terme. Je vais m'arrêter là.
Totalement. J'ai eu la chance de rencontrer aussi Ronan Le Crom qui a éclaté aussi à 28 ans. Et c'est marrant parce que je l'ai rencontré deux semaines avant que je joue. Il m'avait dit de ne pas lâcher, que c'était mental, qu'il fallait pousser la machine et que si ça n'arrivait pas ici ça allait arriver ailleurs. Quand on voit qu'il a joué jusqu'à presque 40 ans...
Propos recueillis par Jean-Charles Danrée, à Dijon.