EXCLU- Alexander Djiku : « Je ne serai jamais dans le superflu » | OneFootball

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·29 septembre 2021

EXCLU- Alexander Djiku : « Je ne serai jamais dans le superflu »

Image de l'article :EXCLU- Alexander Djiku : « Je ne serai jamais dans le superflu »

Taquiné par Alexandre Pierre et Jean-Ricner Bellegarde durant la séance photos au stade, Alexander Djiku ne se laisse pas distraire. Insubmersible, le patron de la défense du Racing Club de Strasbourg prend ensuite place dans les tribunes de La Meinau pour un passionnant entretien de 45 minutes. Avant de finir par un shooting en ville. Interview.


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« Si j’avais dû faire un autre sport, je me serais mis au basket. J’aurais été un shooter. »

Si tu étais journaliste, que chercherais-tu à savoir sur Alexander Djiku ?

Tu commences fort (sourire). Je lui demanderais : « Comment as-tu commencé le foot ? », « Qu’est-ce qui te plaît dans le foot ? » ou encore « Quels sont tes joueurs préférés ? ». Sinon, je pourrais lui demander quelques anecdotes comme son premier bizutage à Bastia. C’était sympa parce que les gars m’avaient proposé deux choix : prendre une claque sur la nuque par tous les joueurs de l’équipe ou chanter. J’avais opté pour la première option (sourire). Un ami avait choisi de chanter, mais il a tout de même été frappé par les autres. Je pense donc avoir fait le bon choix (rires). Me faire chahuter ne m’avait pas fait peur, surtout que ça allait durer 2 minutes. Et puis j’étais habitué à me chamailler et à faire des corps à corps avec mon frère. Je me suis dit : « Ça va durer deux minutes, je vais en prendre un dans mes bras, les autres vont essayer de me frapper et voilà ». Chanter devant tout le monde me mettait un peu plus la pression.

Aurais-tu pu faire un sport de combat ?

Non, pas du tout. J’aime le basket et les sports de raquette comme le tennis, le ping-pong ou le badminton. Si j’avais dû faire un autre sport, je me serais mis au basket. J’aurais été un shooter. J’aime bien prendre les shoots. Je regarde la NBA depuis 4/5 ans. Je suis un footix du basket (sourire). Avant, je ne regardais pas vraiment ce sport à la télé, mais j’y jouais. Comme les terrains de foot, il y en a plein dehors, ça a toujours été un sport accessible.

Qu’est-ce qui t’a poussé à suivre ce sport ?

On va dire que c’est une mode. Après, tu as des références de ce sport comme Michael Jordan qui a laissé une trace indélébile. À partir du moment où tu portes sa marque, tu es obligé de t’intéresser au basket. Ensuite, tu kiffes de plus en plus, et voilà.

Quel est ton niveau au ping-pong ?

Je ne suis pas un top player, mais je me débrouille. J’ai une table chez moi. Je me fais régulièrement des parties avec mon frère quand il vient à la maison. J’aime ce sport.

Peux-tu expliquer ton attrait pour les jeux de société ?

De base, je suis un joueur. Donc dès qu’il s’agit de se confronter à quelqu’un d’autre, j’aime ça. Par exemple, avec mon coéquipier Mehdi Chahiri, on s’affronte tout le temps. On prend des cartes et on invente des jeux. J’aime trop les jeux ! Je suis un compétiteur dans l’âme. Récemment, on a pris un jeux de tarot et on a créé un black jack avec les cartes de 1 à 21, alors que normalement, c’est impossible (rires). Parfois, on va sortir les cartes et on va se faire des défis du style : celui qui tire la plus gros carte. J’aime la compétition, montrer de quoi je suis capable et être meilleur que l’autre. Dans ma tête, c’est compétition, compétition et compétition.

Quels sont tes hobbies ?

Le sport. J’aime faire du travail en muscu. À la fin de ma carrière, je ferai encore de la muscu, parce que j’aime bien ça. Je ne pousse pas trop, sinon, je ne vais plus avancer sur le terrain (rires). Je fais essentiellement du gainage et des abdos. J’aime être costaud. Je kiffe aussi regarder le sport à la télé. Je m’intéresse un peu à tout. Je peux regarder de la natation, mais pas en pratiquer.

J’ai lu que tu aimais les mathématiques et la résolution des problèmes. Ça te vient d’où ?

De l’école. J’ai obtenu mon bac S. Je me débrouille bien dans les matières scientifiques. Dès le début, j’ai kiffé les mathématiques. Je n’étais pas attiré par l’histoire ou le français. Je préférais les choses où il y avait un peu de logique. Après le bac, j’ai dû arrêter l’école. De base, je devais faire une école en alternance. Mais j’étais à Bastia, et l’école se trouvait à Corte, ville située à 1h30. Il fallait y aller souvent, mais j’étais avec l’équipe réserve et j’aspirais à intégrer le groupe pro. J’ai préféré me concentrer sur le foot et lâcher les études.

Si tu n’avais pas été footballeur, tu aurais fait quoi ?

J’ai choisi le bac scientifique, car on m’avait dit que c’était le meilleur. Si je n’avais pas été footballeur, je serais devenu kiné ou professeur de sport, comme mon frère. Je serais resté dans le sport, j’aurais fait 35h de sport, ça aurait été tranquille. Je vois mon frère, il qui est toujours en vacances (sourire rires). C’est bien comme métier, tu t’amuses avec les enfants, tu passes de bons moments.

Quelle est ta relation avec ton grand frère ?

On a commencé le football en même temps. On a 11 mois d’écart. On a joué à Castelnau en U13 et en U15 ensemble. On a toujours eu une bonne fusion. En plus, je jouais milieu droit et lui milieu gauche. C’était marrant parce qu’on nous comparait aux frères TekNo. Lui n’a pas eu la chance de poursuivre le foot à haut niveau et moi, j’ai pu intégrer un centre de formation. Franchement, on était kif-kif, on avait le même niveau. J’ai bien progressé lors de mon année en 16 ans nationaux à Perpignan. J’ai réussi à bien m’adapter au niveau contrairement à lui.

« Je recommande aux jeunes de communiquer. C’est ce qui me manquait au début de ma carrière. »

Tu intègres ensuite le centre de formation de Bastia. Comment as-tu vécu cette expérience ?

Intégrer un centre de formation, c’était un rêve. Ensuite, quand tu arrives au centre, on te dit : « Seulement un ou deux de votre génération passera pro ». Et là, tu te dis dans ta tête : « Ça va être compliqué ». Surtout qu’à Bastia, les premiers entraînements étaient compliqués. Les autres étaient au-dessus techniquement. Petit à petit, j’ai pris mes marques et fait de bons matchs. Deux ans plus tard, je faisais partie des meilleurs de ma génération. J’ai réalisé une belle progression. Ce qui m’a permis de signer pro.

Tu n’avais pas d’appréhension par rapport à la Corse ?

Franchement, non. J’ai quitté la maison à 16 ans pour aller à Perpignan. On était une bande de potes à jouer là-bas. Partir loin de mes parents ne m’a pas fait peur. Après, oui, on a tous entendu des clichés sur la Corse. Mais moi, je ne me suis pas posé de questions. J’y suis allé pour le foot. J’étais uniquement focalisé sur ça. En plus, les clichés étaient faux.

Comment as-tu fait pour te différencier des autres joueurs du centre ?

Mon aspect mental a fait la différence. Je n’ai jamais eu un talent énorme. Par contre, ma force se trouvait dans ma mentalité. J’ai connu de nombreuses blessures, j’ai toujours réussi à m’en remettre. J’ai travaillé, travaillé et travaillé de manière acharnée.

Tu as connu une descente avec Bastia, puis tu as rejoint Caen et tu as vécu une nouvelle relégation. Début de carrière compliqué pour toi…

(Sourire) Au début, je me disais : « Je suis un chat noir ». Bon, il y avait d’autres joueurs dans l’effectif qui avaient déjà connu des descentes. Au-delà de ça, que ce soit à Bastia ou à Caen, j’ai toujours tout donné. Malheureusement, les clubs sont descendus.  En tout cas, j’ai toujours fait en sorte d’être le plus performant. Je ne regrette rien. C’est dommage pour les supporters qui attendaient énormément de nous. Ce sont des choses qui arrivent dans une carrière. Ça forge le mental. Il faut savoir rebondir.

Tu es à Strasbourg depuis deux ans. Penses-tu avoir progressé ?

J’ai progressé sur l’aspect leadership. En venant ici, on m’a fait sentir qu’on voulait faire de moi un leader. Tout le club me voulait : le président, le coach, le directeur sportif. C’était le deuxième plus gros transfert du club. Il y avait beaucoup d’attente autour de moi. Je savais que j’allais passer un palier ici. Dès mon arrivée, on m’a présenté comme un cadre alors que je ne connaissais personne. J’essaie constamment de démontrer sur le terrain qu’on peut s’appuyer sur moi. Je peux entourer les jeunes. J’ai une certaine expérience en Ligue 1 maintenant. Cet été, de nombreux anciens comme Lamine Koné et Mitrovic sont partis. On compte donc encore plus sur moi, notamment pour aider les jeunes. Je prends ce rôle à cœur. J’aime pousser les jeunes, c’est ce qu’on a fait avec moi à l’époque. J’essaie de leur apporter mon expérience.

Tu as déjà été malmené par des anciens ?

Franchement, je trouve que maintenant, on est plus gentils avec les jeunes. Avant, tu ratais une passe, tout le monde te criait dessus. Désormais, on est plus indulgents. On va dire qu’il y a plus de pépites. Quand les jeunes ratent des choses à l’entraînement, on sait que ça arrive et on les pousse vers le haut.

Te souviens-tu d’une anecdote avec un ancien ?

À Bastia, les veilles de matchs, les jeunes étaient mis sur le côté pour faire des centres. Et les anciens faisaient des concours devant les cages. Quand tu ratais un centre, tout le monde te pourrissait à te dire : « Applique-toi ! ». Surtout que les joueurs s’appelaient Toifilou Maoulida, Djibril Cissé, Wahbi Khazri et compagnie. Si tu te loupais, c’était chaud pour toi. En plus, ils pariaient ! Aujourd’hui, si un jeune se rate, on ne va rien dire, c’est plus le coach qui va parler. La mentalité d’avant était différente. C’est bien, ça m’a permis d’avoir cette force de caractère. Mais je t’avoue qu’avant de centrer, j’avais chaud, mon pied tremblait. Pour ne prendre aucun risque, je mettais le ballon au sol. Comme ça, l’attaquant marquait. Les autres disaient : « Mets le ballon en l’air ! ».

Penses-tu avoir permis à un jeune d’émerger depuis que tu es au club ?

Je recommande aux jeunes de communiquer. C’est ce qui me manquait au début de ma carrière. Quand je parlais avec des anciens comme Squillaci ou Modesto, ils me disaient que la communication leur avait facilité les choses. Depuis que je parle plus, c’est plus simple pour moi sur le terrain. C’est ce que j’essaie d’inculquer aux plus jeunes.

« Les attaquants ont toujours des courses préférentielles, soit premier poteau ou deuxième. Et ils changent très rarement. »

Qu’est-ce qu’a apporté Julien Stéphan ?

Il a une bonne philosophie de jeu. Il est porté vers l’offensive, il veut qu’on se crée des occasions. C’est ce que le public recherche : le spectacle. On essaie de mettre ça en place. On cherche à avoir un jeu de possession. On fait aussi un contre-pressing important, c’est-à-dire récupérer le ballon rapidement et se projeter vite vers l’avant. Il a apporté une forme de sérénité, il a redonné confiance à de nombreux joueurs. Il veut que chacun se lâche et joue sur ses qualité. Je pense qu’il a vraiment changé ça : la psychologie des joueurs.

Comment as-tu vécu l’arrivée de Kevin Gameiro ?

Quand on a vu qu’il arrivait, on s’est tous dit la même chose : « Le club est ambitieux ». Les dirigeants ont montré leur ambition avec cette signature. C’est un attaquant qui a gagné quatre Europa League, il a joué dans les meilleurs clubs en Espagne. Il nous apporte son expérience. Il va nous faire du bien. À l’entraînement, il n’est pas trop méchant avec nous, il se préserve pour les matchs (sourire). Il sait se gérer.

Tu as été annoncé sur le départ à plusieurs reprises. N’aurais-tu pas aimé vivre une nouvelle expérience ?

Non, même si être courtisé est valorisant. Ça veut dire que mes performances sont vues et appréciées par des directeurs sportifs. Je suis donc dans la bonne direction. Mais partir pour partir ne sert à rien. Mon meilleur souvenir ici, c’est la Coupe d’Europe. Quand je jouais cette compétition, j’avais des frissons. C’était magique. J’aspire à jouer, de nouveau, une compétition européenne à moyen terme. J’espère que ce sera avec le Racing. Voilà mes aspirations personnelles.

Quels championnats t’attirent ?

J’apprécie l’Espagne par rapport au jeu proposé. Je suis un défenseur qui aime bien relancer proprement. L’Allemagne me plait aussi car c’est box-to-box, un peu comme en Angleterre.

Voir un jeune comme Simakan rejoindre Leipzig doit te donner envie …

Bien sûr. Je suis content pour lui. Surtout qu’il a connu plein de galères et blessures, c’est magnifique pour lui.  J’aspire à jouer la Coupe d’Europe, que ce soit ici ou ailleurs.

Comment définirais-tu ton style de jeu ?

Un défenseur technique et un bon relanceur. C’est un truc que j’ai en moi depuis petit. J’aime les duels et les impacts. Je pense être bien physiquement. Je dois être meilleur sur les relances longues et les transversales. Je dois aussi me montrer plus décisif offensivement. Je ne marque pas assez de buts même si je suis défenseur. En plus, j’ai déjà une célébration pour mon fils et ma fille. Je vais faire avec mes mains un W et un E, pour Wesley et Eliana. Tout est prêt (sourire).

Tu es défenseur, mais tu as également évolué au poste de milieu de terrain. Quelles sont les différences entre les deux postes ?

Il n’y a pas d’énormes différences, ça reste un poste axial. Au milieu, tu cours un peu plus. Ce qui est bien, c’est que tu peux plus attaquer, donc te procurer des occasions pour marquer. Le coach aimait me mettre à ce poste car il savait que j’étais un bon relanceur. Je pouvais aider l’équipe dans la dernière passe ou l’avant-dernière passe. Il aimait aussi mon impact au milieu pour récupérer des ballons. Mais je préfère jouer central, car c’est à ce poste que je suis susceptible de faire une meilleure carrière. Je peux dépanner, mais c’est en défense que je veux m’épanouir et montrer ce que je vaux.

Tu préfère évoluer axe droit ou axe gauche ?

Avant, je préférais être axe droit. Mais j’ai joué deux ou trois saisons où j’ai évolué avec des droitiers. Et comme j’avais un meilleur pied gauche qu’eux, j’ai donc été décalé à gauche. Et maintenant, je suis habitué. Je peux moins utiliser mon jeu long avec le pied gauche. Mais lorsque je rentre sur mon pied droit, j’ai toutes les options : diagonale, passe droite, passe fermée. C’est un mal pour un bien. Parfois, ça m’embête de dégager pied gauche lorsque je suis au poteau de corner. Mais c’est bien aussi car j’ai plus d’angle pour faire des passes pied droit.

Comment analyses-tu tes adversaires ?

Je les analyse sur Wyscout. Ce qui est bien sur ce site, c’est que tous les derniers matchs sont disponibles. Du coup, je regarde les 2/3 derniers matchs de mon prochain vis-à-vis. Au moins, je connais la forme du joueur. J’observe ses déplacements. Les attaquants ont toujours des courses préférentielles, soit premier poteau ou deuxième. Et ils changent très rarement. Ce sont des trucs qu’ils ont en eux. Quand tu vois qu’il a fait 2/3 trucs lors du match précédent, tu es sûr qu’il va te le faire aussi. Et franchement, ça m’aide beaucoup par rapport à mon placement et à l’anticipation. Si je sais que mon attaquant aime prendre la profondeur, je vais prendre un ou deux mètres de recul pour ne pas me faire avoir. Si je sais qu’il décroche beaucoup, je vais anticiper en passant devant lui. Je bosse comme ça depuis trois ou quatre ans, ça m’aide beaucoup. Après, tu as des joueurs imprévisibles comme Neymar. Tu peux les regarder, tu ne sauras jamais ce qu’ils vont faire. Mais sur la plupart des joueurs, cette méthode marche.

As-tu déjà préparé des choses et finalement tout l’inverse s’est produit ?

Oui, avec Di Maria. Quand il a le ballon, il rentre toujours sur son pied gauche. Du coup, quand il est face à moi, j’anticipe sur son pied gauche, et finalement, il me met un crochet pour centrer du droit. Celle-là, je ne l’avais pas prévue. Pour moi, il allait enrouler du gauche vers le deuxième poteau.

« Ce que j’ai apprécié, c’est lorsqu’on m’a surnommé « Van Djiku », en référence à Virgil van Dijk »

As-tu déjà été mis à mal par un attaquant ?

Franchement, un attaquant vraiment costaud… (il coupe puis réfléchit). Je vais te citer un numéro 10 : Gaël Kakuta, lorsqu’il était à Amiens. Ce jour-là, il était « on fire ». Il était incroyable, il avait enchaîné les gestes techniques. Il m’a mis un petit pont en banane. Il était trop fort. Je le trouve encore fort d’ailleurs. Il aurait mérité une meilleure carrière. Ce jour-là, je me disais : « Mais c’est impossible de lui prendre le ballon ». Sinon, je ne me suis jamais vraiment pris la misère par un attaquant. Après si, en vitesse, Mbappé est impossible à rattraper.

Quand tu rentres d’un match, que fais-tu ?

Je regarde mon match. Mais dès le coup de sifflet final, je sais ce que j’ai fait de bien et de moins bien. Je me rappelle de tout. J’analyse mes performances avec mon frère, car il décortique tout. Il me fait ses remarques. On fait ça à deux et c’est bien. Il m’a déjà poussé de petites soufflantes. Il me dit toujours les choses, il ne prend pas de pincettes, ça ne me déplait pas, car ça me fait avancer.

As-tu déjà été piqué par une critique ?

Non, vraiment pas. Qu’on me critique ou qu’on m’encense, je reste calme et tranquille. Certains joueurs regardent tout ce qu’il se dit sur eux, pas moi. Peut-être que je ne suis pas dans un club assez exposé pour recevoir beaucoup de critiques après une contre-performance, comme à Marseille par exemple. Pour le moment, les critiques ne m’atteignent pas. Je passe au-dessus de tout ça.

As-tu été déjà touché par un article ?

Je lis un peu ce qui se dit sur moi mais de moi-même, je ne vais pas prendre le journal et lire. Je ne fouille pas,. Mais ça m’intéresse, donc dès qu’on m’en parle, je regarde directement. Ce que j’ai apprécié, c’est lorsqu’on m’a surnommé « Van Djiku », en référence à Virgil van Dijk. Cette comparaison m’a fait plaisir. Surtout qu’il fait partie des meilleurs défenseurs du monde. Maintenant, certains de mes partenaires m’appellent comme ça (sourire). Je me fais charrier, mais c’est de manière positive donc ça va.

Tu n’as jamais été blessé ?

Non, jamais. Enfin, si, lorsque j’étais plus jeune. Je me rappelle d’un match à Nice. On perdait 3-0 à la mi-temps. Le coach, Ghislain Printant, nous avait tués dans les vestiaires. Il mettait des notes sur 10 au tableau. Il disait : « Toi : 1,5. Toi : 0,5. Toi : 1 ». Il avait embrouillé tout le monde. Et ce jour-là, j’avais fait un sale match. Il m’avait mis 1. Je me souviens que notre attaquant avait eu 6. J’avais été affecté, car il m’avait crié dessus. Et je n’avais pas l’habitude de ça. Il m’avait démonté.

Tu avais du mal avec l’autorité ?

Non, franchement, ça va. Tant que c’est dans le bon sens et avec tout le monde, tout va bien. J’aime bien quand tout le monde est logé à la même enseigne. Personnellement, je préfère qu’on me dise les choses dans le vestiaire devant tous les joueurs plutôt que sur le terrain devant le public et la télévision. Je n’aime pas le cinéma devant tout le monde. Moi, j’accepte tout, surtout quand il y a des arguments. Si c’est équitable, ça ne me dérange pas. Par contre, je n’aime pas la différence. Maintenant, j’ai pris de l’expérience, on me crie moins dessus. Ça m’embête quand on crie sur un jeune pour une erreur que moi-même j’ai faite.

Tu es considéré comme un joueur aguerri de Ligue 1. Comment faire pour passer un palier ?

Souvent, on stagne à cette étape. Moi, j’ai la chance de progresser continuellement. La saison dernière a été la meilleure de ma carrière. Il faut que je continue à évoluer. J’ai pris énormément de choses en compte, la nutrition et la récupération notamment. Maintenant, je suis international, j’effectue des voyages de 6h pour rejoindre le Ghana. Ensuite, tu enchaînes un voyage de 5h pour aller au Soudan. Ce sont de longs périples. Je fais encore plus attention. J’ai trouvé un centre de cryothérapie et d’oxygénothérapie à côté de la maison, Capital Santé, je m’y rends une à deux fois par semaine. Ça me fait du bien et ça joue sur mes performances. Petit à petit, j’améliore des choses dans mon quotidien. Le club a engagé un coach spécialisé dans la récupération et la nutrition. C’est la preuve que le Racing est ambitieux et qu’il cherche à mettre les joueurs dans les meilleures conditions. Je progresse, je ne stagne pas.

Comment gères-tu ton alimentation ?

Quand je me lâche, c’est après le match ou le lendemain. Sinon, je fais attention. Je travaille notamment avec une entreprise strasbourgeoise, Cuisinefit. Ils me font des plats sains que je réchauffe. Le nouveau coach a imposé le petit déjeuner et le déjeuner au club. Du coup, j’ai juste à manger le soir. Je suis bien encadré par rapport à ça. De toute manière, je n’ai jamais eu de problème avec la nourriture ou avec mon poids. Pendant les vacances, je me fais plaisir. Mais durant la saison, je fais attention à tout pour éviter les blessures.

« Au début, ma femme n’y connaissait rien, elle ne s’y intéressait pas du tout. Et petit à petit, à force de regarder mes matchs, elle commence à comprendre, à connaître les positionnements. »

Tu es désormais international ghanéen. Que peux-tu nous dire sur le football africain ?

Les terrains sont particuliers (rires). Ce qui est bien, c’est que tu sens immédiatement que c’est complètement différent de l’Europe et de la France. En Afrique, tu joues au foot pour t’amuser, tu prépares les matchs d’une manière bien spéciale. Tu ne vas pas au match avec ton casque sur la tête. Tout le monde chante et met de l’ambiance, il y a une vraie communion et une vraie osmose. Tu te concentres différemment, tout le monde est content et joyeux, c’est festif. Ça donne une autre image du football.

N’es-tu pas mis de côté par les autres ?

Non, tout le monde parle anglais. Et je prends des cours d’anglais. Je me débrouille en anglais, je comprends. Les frères Ayew parlent français, John Boye et Kwateng aussi. J’ai été bien accueilli.

Tu devrais partir à la CAN en janvier et quitter Strasbourg durant un mois…

C’est comme ça. Ce sont les obligations du pays. J’espère vivre ma première grande compétition internationale. On a beaucoup d’ambition pour cette CAN. J’espère aller le plus loin possible. Et pourquoi ne pas la gagner. On n’a pas remporté cette compétition depuis un moment. On est la troisième nation la plus titrée après l’Égypte et le Cameroun. Le Ghana est dans une période de renouveau, de nombreux binationaux rejoignent la sélection. J’espère qu’on va réussir quelque chose. Avant d’être sélectionné, je me suis bien renseigné sur le pays. J’ai été avec mon père et mon frère. On a été au village. J’ai pris mes marques petit à petit. J’ai connu mes premières sélections, tout va bien.

As-tu été marqué par certaines habitudes ?

Oui, on prie beaucoup. Que ce soit les musulmans ou les chrétiens, on prie avant et après chaque entraînement. On fait toutes nos prières. Ce qui est bien, c’est qu’on prie tous ensemble. Tout le monde se respecte et tout le monde respecte les religions. C’est un truc que j’aime bien. On le fait moins en Europe. Ensuite, il y a le bizutage aussi. Ce n’est pas comme en France. Tu ne chantes pas. Là-bas, tu dois danser durant une minute. Franchement, c’est long ! Tout le monde se met devant toi et te regarde. Et si tu n’es pas bon, on te laisse jusqu’à ce que tu donnes satisfaction (sourire).

Es-tu attaché à la religion ?

Oui, je suis catholique. La religion a une place importante dans ma vie. Je prie tous les jours et je vais à l’Église avec ma femme.

Ta femme s’y connait en football ?

Au début, elle n’y connaissait rien, elle ne s’y intéressait pas du tout. Et petit à petit, à force de regarder mes matchs, elle commence à comprendre, à connaître les positionnements. Elle sait quand je fais de bonnes actions ou de bonnes interventions. Elle sait également quand je suis moins bien. Parfois, elle me dit : « Là, tu as fait un bon truc ». Le week-end dernier, j’ai réussi deux bons tacles et le public a crié. Du coup, elle m’a dit : « Là, c’était bien ce que tu as fait ». Je lui ai dit : « En même temps, tu as été aidé par les supporters » (rires). Un jour, elle m’a sorti : « Tu as fait une bonne passe cassée ». En fait, c’est à force de m’entendre utiliser ce terme avec mon frère. Ça prouve qu’elle s’intéresse, c’est bien. Elle est importante pour moi. Elle a mis entre parenthèse sa carrière professionnelle, car on a eu un deuxième enfant. Mais elle va reprendre prochainement. Elle a créé sa marque de serviettes de bain. Elle a mis en place un site internet et une page instagram (voir lien hypertexte) pour vendre ses produits. Je la soutiens dans tout ce qu’elle entreprend. De toute manière, tous les gens de mon entourage qui ont des projets, je les aide autant que je peux.

Tu as deux enfants dont un garçon. Tu comptes le mettre au foot ?

Ma fille a 10 mois et mon fils deux ans et demi. Au début, il ne jouait pas au foot. Mais à force de me voir jouer au foot à la télé, il commence à taper dans le ballon. Le plus important pour moi, c’est qu’il fasse un sport, qu’il se défoule et qu’il se dépense. Si c’est footballeur, tant mieux. En tout cas, il ne subira pas de pression particulière par rapport à ça.

Tu es issue d’un milieu modeste et tu gagnes désormais bien ta vie. Comment gères-tu ce changement de catégorie ?

Je le gère plutôt bien. Comme tu l’as dit, je suis issu d’un milieu modeste. Je ne peux pas faire n’importe quoi, car j’ai toujours mon entourage pour me rappeler à l’ordre si je dépasse les limites. Même si je ne suis pas comme ça. Tu as toujours quelqu’un qui te remet les pieds sur terre. Mon frère et mes parents savent très bien le faire. Je ne serai jamais dans le superflu ou l’exagération.

Tu n’as jamais fait une folie ?

Mis à part ma voiture actuelle, non. C’est ma première grosse folie. Même mes parents ont vite compris. Ils m’ont dit : « À un moment donné, tu gagnes ton argent, tu as le droit de te faire plaisir de temps en temps ». Parce que moi, justement, je me posais trop de questions. Je me disais : « Est-ce que j’achète ça ? Est-ce que ça en vaut la peine ? ». Mes parents m’ont dit : « Tu peux te faire un kiff, tu ne vas pas mourir avec ton argent ». Ce sont eux qui me poussent un peu. Je n’ai jamais été attiré par les grosses voitures ou les bijoux. Maintenant, je me fais plus plaisir. J’ai acheté une maison à mes parents, je sais qu’ils sont à l’abri. Je construis également une maison au Ghana. Je peux me permettre de penser davantage à moi.

Quelle est ta prochaine grosse dépense ?

Désormais, je suis tourné vers l’immobilier. Ce sera une grosse dépense qui sera ensuite rentable. Ce sera un investissement pour mon patrimoine plutôt qu’un investissement personnel (Il coupe). J’avais oublié ! J’ai commandé une montre il y a un an. Elle est arrivée, il y a un mois. C’est ma première Rolex. En plus, quand on achète une belle montre, il faut penser à la revente aussi. Et j’ai vu que c’était une montre rare. Et quand j’ai vu que Kevin Gameiro avait la même, je me suis dit : « Ce n’est pas pour rien s’il a cette montre » (rires). C’est une Rolex Batman. En plus, ça fait bien, le poignet est habillé.

« Dès qu’un truc ne me plait pas, ça va directement se voir sur ma tête. Je ne fais pas semblant. »

Comment décrirais-tu la personnalité d’Alexander Djiku ?

Je suis simple, déterminé et bienveillant envers les personnes que j’aime. Concernant mes défauts, je peux être lunatique. Je peux rapidement changer d’humeur. Dès qu’un truc ne me plait pas, ça va directement se voir sur ma tête. Je ne fais pas semblant. Que ça plaise ou non, c’est comme ça. Si je n’ai pas envie de parler avec quelqu’un, je le montre. En général, je suis de bonne compagnie. Je suis aussi mauvais perdant. C’est mon côté compétiteur qui veut ça. Par contre, je ne suis pas un boudeur. Après une défaite, ma première réaction, c’est « Viens on rejoue ». Ensuite je gagne et là, je peux aller dormir tranquillement (sourire).

Tu es engagé dans des actions caritatives, tu soutiens l'association "Pour l'Amour 2 Nathan". Comment s’est opérée la connexion avec sa famille ?

Par l’intermédiaire de mon pisciniste. Pendant le confinement, il a parlé avec ma femme. Il nous a parlé d’un petit qui s’appelle Nathan, vivant à 15 minutes de la maison. Il a le syndrome d’Angelman, ce qui provoque de l'hyperactivité, des troubles du langage, de la motricité, du sommeil et de la nutrition. On a immédiatement eu la volonté de s’investir auprès de cet enfant. On a d’abord rencontré ses parents. Tout s’est bien déroulé, le feeling est passé. On a beaucoup échangé. On leur a rendu visite une deuxième fois. On a vu que les parents faisaient tout pour aider leur enfant. Par exemple, ils font des voyages à Barcelone pour se rendre dans un centre spécialisé. Ces déplacements occasionnent de nombreux frais. On a décidé de les aider financièrement et sur les réseaux aussi. On continue de soutenir cet enfant et cette famille. Ses parents m’ont demandé d’être le parrain de l’association. J’ai directement accepté. C’est une belle preuve de confiance. Quand je vois Nathan, je le prends dans mes bras, je joue avec lui. La connexion est top.

Si tu pouvais bénéficier d’un super pouvoir, tu choisirais lequel ?

La téléportation. C’est grave bien ! Si demain je veux me rendre à New-York, j’y suis en un claquement de doigts. Ensuite, je peux aller à Las Vegas puis à Accra en quelques secondes. Ce serait le rêve. Je préfère ce pouvoir plutôt que d’être immortel.

Si tu pouvais changer quelque chose dans ta vie, ce serait quoi ?

Pour le moment, rien. Ma vie est faite d’embûches, mais je m’en suis toujours bien sorti.

Si tu devais terminer l’interview par une phrase qui te représente, que dirais-tu ?

Ta question est compliquée, car je sais que ça va être le titre (rires). Je dirais : « Rien n’a été facile pour moi, j’ai toujours été chercher les choses ». Voilà ce qui me représente et ce qui me caractérise. Je ne suis pas un garçon très talentueux, par contre, je suis un battant. Le travail et la persévérance m’ont permis de devenir professionnel.

Penses-tu être jugé à ta juste valeur ?

Bien sûr. Mais comme je dis toujours : laissons le temps au temps. On verra ce que l’avenir nous réserve. En tout cas, je suis content de ma carrière et de ma progression. J’ai franchi les étapes petit à petit.

Tu te mets quelle note pour cette interview ?

Je me mets 8 sur 10. J’ai été pas mal.

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