BeFootball
·16 juin 2024
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·16 juin 2024
Sympathique et attachant, c’est ainsi que nous pouvons décrire notre première impression de Žan Vipotnik. Attaché aussi à son nouveau club : Bordeaux. Malgré un planning chargé et une préparation avec la Slovénie entamée très tôt, le numéro 9 a tenu à se rendre disponible pour nous détailler sa première saison avec son club de cœur.
Et d’afficher surtout ses espoirs concernant sa première compétition internationale : l’Euro 2024. Une fois arrivé au camp d’entraînement de la Slovénie basé à Freudenstadt, tout près de la frontière française, Žan Vipotnik détaille dans sa chambre en Anglais et avec quelques mots de français, qu’il apprend. Les particularismes de son pays, son retour au premier plan après 24 ans de disette, ses souvenirs d’enfance des Girondins, sa marge de progression en terre bordelaise, son esprit et le reste.
On a l’impression que la Slovénie, c’est uniquement Luka Dončić et Jan Oblak. Parlez-nous de votre pays.
C’est un grand plaisir d’être slovène. Je suis très heureux d’être né ici et de mon enfance. Je pense qu’on est très connectés entre nous, car nous sommes un petit pays de seulement deux millions d’habitants. Ce n’est pas facile d’être en concurrence avec les grosses nations, mais je pense que nous sommes une population de très grands sportifs. Nous avons une très bonne équipe de basketball qui est championne d’Europe, nous avons Luka Dončić qui est selon moi le meilleur joueur de NBA en ce moment.
Nous avons une très bonne équipe de football, avec quelques grands noms. Je pense que nous pouvons faire de très bonnes choses avec cette équipe. On ne peut pas regarder qu’un seul joueur, comme Oblak ou Šeško, car c’est un sport collectif et nous pouvons faire de bonnes performances avec cette équipe.
Mettre le réveil pour regarder la NBA ou allumer la télévision pour suivre les joueurs slovènes en Europe : quelle est la tendance actuelle au pays ?
Actuellement, c’est sûr que c’est pour Dončić car il est en finale de NBA. C’est le numéro un, donc c’est la tendance. Mais après ça, avec l’équipe nationale de Slovénie, nous sommes prêt pour l’Euro donc je pense que tout le pays va être avec nous devant son téléviseur.
Quel parallèle faites-vous entre la manière dont les gens se sentent concernés par le football en Slovénie et en France ?
En Slovénie, le football n’est pas aussi populaire qu’en France. En Ligue 2 où j’évolue, nous avons de très bons stades. En Slovénie nous n’en avons que quatre come ça et le reste n’est pas aussi bien qu’il devrait l’être. Au NK Maribor (où il évoluait de à 2021 à 2023, ndlr), c’était le top de la Slovénie. Les fans vivent pour le football. Ce club pourrait être concurrent de certains clubs de Ligue 2 française.
C’est un très grand club, avec de bonnes traditions, de très bons supporters. Mais au niveau football, la Slovénie n’est pas comme la France. Par exemple, en Ligue 2, chaque match au Matmut Atlantique se joue devant 15.000 à 20.000 personnes. En Slovénie, nous n’avons pas de stades pour accueillir autant de monde. Les infrastructures ne sont pas si bonnes. La France est un plus grand pays qui en possède de meilleures et avec une plus grande population qui regarde le football. Dans ces conditions, le football progresse.
L’Euro doit trouver son public, étant donné que cette génération est la première en 24 ans et 5 éditions à se qualifier…
Quand nous nous sommes qualifiés, je n’arrivais pas à le croire. J’ai fait beaucoup avec l’équipe pour l’aider à l’Euro. Pour moi, ça représente vraiment beaucoup de choses. C’est un grand tournoi, surtout pour la Slovénie. C’était difficile de se qualifier. Nous en avons été proches parfois, mais il a toujours manqué quelque chose. Je pense que ces derniers matchs de qualification ont été parfaits (sept victoires, un nul, deux défaites en dix matchs, ndlr).
Il y a juste deux matchs où nous n’avons pas joué comme nous l’aurions voulu (Danemark 2-1, Finlande 2-0). Mais nous avons bien joué lors des autres rencontres. Nous connaissons nos points forts et nos points faibles. Nous essayons de jouer sur nos points forts autant qu’on le peut. Si nous jouons comme ça à l’Euro, ce tournoi restera gravé dans l’esprit des supporters. Après 24 ans ça veut dire beaucoup. Nous jouerons avec le cœur.
Personne ne vous fera de cadeaux dans ce groupe C (Angleterre, Serbie, Danemark).
C’est un groupe difficile. Nous devons y aller avec la mentalité qu’il est possible de sortir du groupe. Chaque match commence à 0-0 et nous avons nos chances en jouant bien. Si nous faisons les choses de notre mieux, ça pourrait être très bien. Nous pouvons dire que l’Angleterre est favorite, mais comme je l’ai dit, chaque match commence à 0-0. Si nous jouons bien, que nous sommes dans un bon jour et que nous avons la bonne mentalité, ça peut le faire.
Il a travaillé dur en revenant à Maribor, seul et avec un préparateur physique. Il mérite ce qui lui arrive aujourd’hui. Žan Vipotnik à propos de Josip Iličić
Parlez-nous des points forts de la Slovénie. En respectant le gage suivant : ne pas citer Jan Oblak.
Comme je l’ai dit, nous sommes une bonne équipe. Il y a une bonne communication entre les joueurs et le staff. Quand nous jouons ensemble, nous jouons bien. C’est la principale mentalité de la Slovénie. Si nous jouons comme un seul homme, que ce soit sur le banc, sur le terrain, avec le coach et tout le monde, nous pouvons faire de bonne choses. Mais ça reste difficile.
Šeško ? C’est une machine. Il a très bien joué, surtout en deuxième partie de saison. Nous sommes en contact chaque semaine. Ses six premiers mois à Leipzig ont été bons malgré le fait qu’au début il a dû s’adapter physiquement à un autre niveau. Mais en deuxième partie de saison, il a très très bien joué (treize fois décisif en seize rencontres ,ndlr). Nous verrons comment va se passer la suite.
Il y a la belle histoire du retour de Josip Iličić. En quoi cela inspire-t-il le groupe ?
Je ne connais pas l’histoire en détail, je ne lui ai pas demandé. Mais d’après ce que j’ai lu dans les journaux, ça a été difficile pour lui. En plus, Bergame était à l’époque l’une des villes les plus touchées par le Covid. Ce n’était pas facile, mais il est revenu. Il a travaillé dur en revenant à Maribor, seul et avec un préparateur physique. Il mérite ce qui lui arrive aujourd’hui. C’est un joueur incroyable. Il est magique, je ne sais pas comment l’expliquer. L’an dernier je jouais avec lui à Maribor. J’étais là quand il est revenu au club et quand il a marqué.
Et maintenant je suis ici avec lui en sélection. Il a de la qualité dans les pieds, quelque chose que je n’ai vu qu’une fois dans ma vie, car je n’ai pas vu Messi jouer. Je pense qu’à son prime lorsqu’il jouait à l’Atalanta, Iličić faisait partie des trois meilleurs joueurs du monde. Il y a notamment les quatre buts qu’il marque à Valence en huitième de finale (de Ligue des champions 2019-20, ndlr). Seuls trois joueurs l’ont fait. Jouer à ses côtés, c’est super. On apprend beaucoup. C’est un très bon gars, avec une très bonne mentalité. Nous pouvons le voir à l’entraînement déjà, mais en match c’est magique.
Est-ce que vous pensez à devenir la star de cette équipe d’ici quelques années ?
C’est mon objectif. Je connais mon potentiel. Je sais ce dont je suis capable. Je crois en moi, en ce que je peux faire avec Sesko à la pointe de l’équipe. Est-ce mon rêve ? Oui, ça l’est. Je vis pour être le joueur qui sera important pour la sélection slovène.
Žan Vipotnik rêvait de Bordeaux enfant, voilà qu’il est le numéro 9 des Girondins. Photo by Anthony Dibon/Icon Sport) – Photo by Icon Sport
Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre Bordeaux ?
À Maribor, j’avais un coéquipier Azbe Jug (gardien de but). Il jouait à Bordeaux (2011-2015) et nous en avons parlé plusieurs fois. Il ne m’a dit que des choses positives à propos du club. Pour moi, Bordeaux est l’un des top clubs en France. Je connais son histoire, je connais presque tout à propos du club. Quand j’étais jeune, je collectionnais les albums panini des clubs et je me souviens de cette équipe en Ligue des Champions.
Maribor l’a joué plusieurs fois. Quand Bordeaux y était, c’était aussi donc aussi le cas du NK. C’était mon rêve de jouer chez les Girondins. Quand je suis arrivé, le plaisir était immense. Je n’arrive toujours pas à croire que je joue pour ce club fantastique.
Vous avez choisi des Girondins qui n’ont jamais été aussi instables…
Ce n’était pas notre meilleure saison… Nous devons nous améliorer pour la saison prochaine. Je sais que les supporters ne sont pas contents. Nous avons fait de notre mieux, mais parfois vous n’avez pas de chance. Je pense que nous avons montré de bonnes choses, mais nous devons prouverqu’on peut jouer 90 minutes de la bonne manière.
Parfois nous avons très bien joué, avec beaucoup de possession et d’occasions, mais nous n’avons pas marqué assez de buts, comme nous aurions dû le faire. Nous sommes conscients, moi le premier et les autres aussi, que nous devons être plus efficaces, car nous sommes Bordeaux. Comment l’expliquer ? Je ne sais pas. Nous avons tout fait. La question est difficile. Maintenant, l’objectif, c’est une bonne préparation pour bien entamer la saison prochaine. Elle sera nôtre.
« Je connais presque tout à propos du club. Quand j’étais jeune, je collectionnais les albums panini des clubs et je me souviens de cette équipe en Ligue des Champions. »
Quand Bordeaux (12ème) a dégringolé au classement du championnat, aviez-vous imaginé que ça serait aussi bas ?
Au début de saison, je ne l’imaginais pas pour être honnête. J’espérais au moins atteindre le top 5. On peut dire que nous avons mal commencé la saison (cinq victoires en quinze matchs,ndlr). Nous devons apprendre de cette saison. Bordeaux mérite plus et les supporters attendent plus, alors nous devons montrer plus. La place des Girondins est en Ligue 1. C’est un club spécial en France. J’espère – je sais – que nous commencerons mieux la saison prochaine.
Laurent Guyot, l’entraîneur du FC Annecy, vous a décrit comme un joueur de Ligue 1 plutôt qu’un joueur de Ligue 2. Cela signifie beaucoup…
Je n’étais pas au courant. Mais j’apprécie. Je sais que j’ai manqué beaucoup d’occasions la saison dernière. Je pourrais dire que c’est parce que c’est ma première saison, mais je n’aime pas les excuses… Je dois être honnête avec moi-même et me dire que j’ai fait des erreurs cette saison. Je dois m’améliorer pour être ce joueur de Ligue 1, comme le coach d’Annecy l’a dit. Je ferai de mon mieux, je vais m’améliorer pour y jouer.
Est-ce qu’on va trop vite en besogne en vous demandant si vous allez finir meilleur buteur de Ligue 2 la saison prochaine ?
Le rêve de tout attaquant est d’être le meilleur. C’est normal. Mon objectif est de marquer à tous les matchs. Si c’est le cas, ce sera super pour le club et pour moi. Je n’aime pas parler, j’aime agir. Il faut prendre les matchs les uns après les autres. On verra ce que cela va m’apporter.
Vous vous donnez à fond sur le terrain et en dehors aussi, en prenant des cours de français. Cela traduit-il une volonté de s’inscrire sur le long terme avec Bordeaux ?
J’ai un contrat de quatre ans. Je me sens bien ici. J’apprends le français, une langue que j’apprécie. J’aime Bordeaux et tout ce qu’il y a autour. La ville, le club qui est incroyable. J’aime la France et je m’y sens bien. Dans le football, si tu te sens bien, tu joues bien, l’inverse est aussi valable. Mais moi, je me sens bien.
Propos recueillis par Hicham Bennis.