Le Journal du Real
·19 avril 2025
Le Real Madrid, un orchestre sans chef depuis le départ de Kroos

Le Journal du Real
·19 avril 2025
Quand Toni Kroos a quitté le Real Madrid, il l’a fait à sa manière. Sans grand discours, sans pathos, mais avec élégance. Une sortie par la grande porte, une Ligue des champions en poche, des enfants au bord du terrain et cette image d’un homme qui quitte la scène sans l’avoir ternie. Pourtant, son départ a laissé un vide. Pas seulement émotionnel. Un vide stratégique, visible, presque palpable. Le Real Madrid pensait pouvoir tourner la page en regardant vers demain, mais le football, lui, ne tourne pas si vite.
Dans les couloirs du Bernabéu, on avait tout prévu. L’avenir était entre les mains de Valverde, Tchouaméni et Camavinga. Trois profils puissants, modernes, capables de couvrir des kilomètres et de faire du bruit dans un football devenu frénétique. Mais à trop miser sur le volume, le Real Madrid a oublié la nuance. Celle qu’apportait Kroos, capable de ralentir un match, de poser le tempo, de contrôler les battements d’un match comme on règle un métronome.
Le problème, ce n’est pas le talent. Individuellement, les trois milieux ont de quoi briller dans n’importe quel club européen. Mais aucun ne possède ce sens du jeu, cette capacité à organiser, à éclairer. Valverde a gardé le numéro 8, mais pas l’essence. Camavinga et Tchouaméni ont été perturbés par les blessures et les repositionnements. Et dans les mauvais soirs, nombreux cette saison, la question est revenue : qui commande au milieu ? Qui pense le jeu ? Qui donne le calme dans la tempête ?
Le souci est aussi philosophique d’après Relevo. Florentino Pérez voulait une équipe plus physique, plus directe, presque brutale dans l’intensité. Mais il a confié cette partition à un chef d’orchestre qui ne parle pas ce langage. Ancelotti, ancien milieu des années 80, ne croit pas au tout-puissant pressing. Il croit au contrôle, à la régulation, à l’ordre. Lui donner un milieu sans régisseur, c’était comme demander à un pianiste classique de diriger un groupe de rock sans partition.
Alors Madrid s’est cherché. Dani Ceballos, parfois évoqué comme l’héritier, n’a jamais pleinement convaincu. Modric, lui, reste une légende, mais en version réduite. Et même dans les scénarios les plus fous, Arda Güler ou Nico Paz n’ont jamais semblé être une réponse crédible pour cette zone. La rupture entre les idées de la direction et les besoins de l’entraîneur s’est creusée au fil des semaines. Jusqu’à ce que l’élimination européenne vienne sanctionner cette désunion.
Le Real Madrid voulait prouver qu’il pouvait vivre sans Toni Kroos. Il a surtout montré à quel point ce genre de joueur est irremplaçable. Non pas pour ses statistiques, mais pour sa lecture du jeu. Pour sa capacité à faire simple dans un football devenu trop complexe. Pour le lien invisible qu’il créait entre la défense et l’attaque. Kroos est parti au bon moment, mais peut-être que le club, lui, s’est trompé de timing.