Lucarne Opposée
·22 janvier 2025
Lucarne Opposée
·22 janvier 2025
La trente-et-unième édition du Sudamericano U20 ouvre ses portes ce jeudi au Venezuela. Après quelques conflits politico-diplomatiques, la jeunesse sud-américaine va se disputer l’une des quatre places qualificatives pour la prochaine Coupe du Monde.
Neuf équipes pour quatre places. Alors que le Chili accueillera la prochaine Coupe du Monde de la catégorie en septembre prochain, les autres nations de la zone se disputent ainsi un rêve mondial et se rendent pour l’occasion au Venezuela. Délocalisé après les scandales ayant touché l’ancien hôte péruvien, le Sudamericano U20 numéro 31 se dispute entre Caracas, Cabudare, Valencia et Puerto La Cruz et répartit les dix nations de la CONMEBOL en deux groupes de cinq desquels les trois premiers se hisseront à l’hexagonal final pour décrocher l’une des quatre places de mondialiste. C’est donc un véritable marathon qui se prépare à être lancé ce jeudi, les futurs qualifiés se préparant à disputer neuf matchs en vingt-quatre jours.
Est-ce le privilège de l’hôte ? Le fait est que le Groupe A, celui du Venezuela, permet à la Vinotinto d’éviter quasiment tous les grands prétendants au top 4 final, à l’exception de l’Uruguay dont nous reparlerons dans un instant. Il faut dire que depuis la deuxième place mondiale de la génération Wuilker Faríñez – Yeferson Soteldo, le Venezuela n’a plus retrouvé le goût des joutes mondiales, la sélection craquant lors de l’hexagonal final des deux derniers Sudamericano. Arrivé à la tête des jeunes en 2023, Ricardo Valiño avait permis aux U17 de se hisser en huitièmes de finale de la Coupe du Monde de la catégorie, une première dans son histoire. Malheureusement pour lui, il ne pourra compter sur deux des joyaux de cette équipe, David Martínez et Juan Arango Jr. et sa sélection se présente avec une dynamique loin d’être positive, le Venezuela n’ayant plus marqué de but depuis le 1-1 d’octobre dernier face au Paraguay, soit une disette de cinq matchs. Sur le papier, le groupe formé par le technicien argentin est composé pour près de la moitié de joueurs évoluant ou étant formé hors du pays. On peut ainsi citer : Yiandro Raap, qui évolue chez les jeunes du PSV et a déjà porté le maillot oranje en U17, Javier Suárez, défenseur mexicano-vénézuélien évoluant à Cruz Azul et ayant porté le maillot du Tri en U17, Victor Fung, de l’Inter Miami, qui a participé à la Coupe du Monde U17 2023 avec le Canada, Luis Balbo, formé au Portugal dont il a porté le maillot national en U16, évoluant désormais avec la Fiorentina U19, Alessandro Milani, formé à la Lazio et ancien international U17, U18 et U19 italien, Daniele Quieto, évoluant chez les jeunes de l’Inter et également ancien international italien des U17 aux U19 ou encore, plus incroyable, Nicola Profeta, formé au Deportivo Cali aujourd’hui avec les U20 de Santos et qui était le capitaine de la sélection colombienne U17 lors du Sudamericano de la catégorie en 2023. Les exemples sont nombreux, ils symbolisent un changement de politique chez les jeunes dans un pays qui avait longtemps misé sur sa capacité à produire des talents. Reste donc à savoir si le choix sera payant, même si le groupe, une fois encore, parait extrêmement abordable.
D’autant qu’il compte deux voisins aux dynamiques globales plutôt compliquées : le Pérou et le Chili. La Blanquirroja de José del Solar arrive dans un contexte local totalement désastreux, marqué par les scandales autour de la fédération, la débâcle des A et les crises au niveau de sa ligue professionnelle et surtout se présente au Venezuela en tant que pays-hôte déchu. Ajoutez à cela que le sélectionneur a déjà annoncé qu’il n’irait pas plus loin que le tournoi et vous pourrez vous demander ce que le Pérou peut espérer alors qu’il n’a gagné qu’un seul de ses douze derniers matchs au Sudamericano et est sortie du dernier avec quatre défaites en autant de matchs. On suivra tout de même l’espoir de Cristal, Maxloren Castro, ou le puissant attaquant de l’Alianza Lima, Víctor Guzmán. Pour le reste, les rêves d’avenir au Pérou semblent encore bien flous et sans grand ménage au sein des instances, il semble difficile d’être optimiste.
Au Chili, l’avenir a été mis entre les mains de Nicolás Córdova. L’ancien entraîneur de Palestino et des Wanderers aborde le tournoi avec la certitude d’être présent à la prochaine Coupe du Monde de la catégorie, le Chili en étant l’hôte. Il peut ainsi travailler à installer une nouvelle dynamique, les U20 n’étant que peu habitués à briller au Sudamericano depuis la génération dorée à l’exception de 2013 et ses U23 ayant totalement échoué dans la course aux JO 2024. Il pourra s’appuyer sur un facteur X nommé Damián Pizarro, parce qu’il évolue déjà en Europe, à l’Udinese, mais le pays comptera également sur des joueurs tels que Juan Francisco Rossel, déjà aperçu en championnat avec la Católica, Emiliano Ramos, petit ailier déjà très en vue à Everton ou encore Iván Román, déjà titulaire indiscutable en défense centrale avec Palestino.
Grande sensation du Preolímpico, le Paraguay veut surfer sur cette vague alors que ses A ont enclenché une excellente dynamique dans les éliminatoires sud-américains. Sous la houlette d’Aldo Duscher, la sélection guaraníe se teinte d’albiceleste, se dotant de quelques joueurs nés et évoluant en Argentine, à l’image de Luca Kmet, ailier des équipes de jeunes de Lanús, Lucas Guiñazú, fils de Pablo, ancien international argentin, Santiago Puzzo, milieu formé à Quilmes, ou encore Gadiel Paoli, défenseur central des jeunes de Boca. Une forte colonie qui fait quelque peu parler au pays. Reste que sur le terrain, on surveillera bien évidemment le futur Red Devils Diego León, leader de cette sélection, son coéquipier en club, Gabriel Aguayo, machine à déborder et centrer du Cerro Porteño, ou encore Tiago Caballero qui compte déjà plus de cinquante matchs avec Nacional et qui s’annonce comme étant le buteur attitré des jeunes guaraníes. Dans un tel groupe, l’Albirrojita a très certainement son mot à dire et devrait, sauf accident, se hisser à l’hexagonal final.
Reste enfin celui qui a tout pour être le favori du groupe, l’Uruguay. Une position que la Celeste n’aime que peu, il suffit de se souvenir de l’énorme échec que fut le Preolímpico où les champions du monde U20 renforcés et dirigés par Marcelo Bielsa s’étaient totalement ratés. Il est donc aussi et surtout question de rebond. Pour cela, l’Uruguay retrouve Fabián Coito à sa tête, lui qui l’avait mené au titre en 2017 et à la troisième place en 2019. Et s’appuie sur sa capacité à fabriquer des talents. Citons par exemple Joaquín Lavega, ailiers de River Plate de Montevideo déjà transféré à Fluminense après avoir disputé près de cent matchs de première division avec son club depuis ses seize ans, Thiago Helguera, ancienne machine à gagner des duels au milieu avec Nacional, aujourd’hui avec les jeunes de Braga, ou encore Alfonso Montero, fils de Paolo, et Agustín Albarracín, frère de Nicolás. L’hexagonal final ne devrait pas être une mission trop compliquée à accomplir, c’est alors qu’on jugera véritablement du niveau des héritiers des champions du monde.
Une fois le Groupe A passé en revue, les habitués du paysage sud-américain auront déjà noté que le deuxième groupe est bien plus dense et provoquera une grosse victime. Car parmi les géants argentins et brésiliens ou les usines à talents colombiennes et équatoriennes, une de ses formations ne se qualifiera pas pour le tour final. Autant dire que ce groupe de la mort semble déjà compliqué pour son dernier membre, la Bolivie, promise à n’être qu’une victime expiatoire, la Verde n’ayant gagné que deux matchs de Sudamericano en sept éditions. Il y aura donc du travail pour l’entraîneur argentin Jorge Perrotta, qui doit se passer de Gabriel Montaño, rattrapé par une affaire de triche à l’âge, même s’il peut compter sur quelques talents fortement attendus au pays : les expatriés Marcelo Torrez et Óscar López ou encore l’une des promesses évoluant au pays, Moises Paniagua. Reste que cela s’annonce compliqué tant ce groupe B est monstrueux.
Alors qu’il pourrait aligner des Estevão et autre Endrick, l’export précoce de ses meilleurs jeunes prive le Brésil de ses deux grands facteurs X. Un phénomène qui persiste et qui continue de frapper les plus grands espoirs et ne cesse de priver le sélectionneur des meilleurs choix. Il reste évidemment de la qualité, tant le vivier est grand au pays et nombreux seront donc les clubs du monde entier à venir observer de près un groupe composé en grande majorité de talents locaux même si certains, comme Gabriel Carvalho qui, du haut de ses dix-sept ans, s’envolera déjà pour l’Arabie saoudite à sa majorité, sont déjà plus ou moins « réservés ». Ce dernier sera l’un des joueurs à suivre aux côtés de Gabriel Moscardo, que les supporters du PSG suivront avec attention aidés par le fait qu’il cumulera probablement plus de minutes qu’avec le Stade de Reims où il est prêté. On suivra aussi d’autres expatriés parfois au temps de jeu réduit en club, comme Moscardo donc, ou Pedrinho au Zenit, parfois animant les équipes de jeunes en Europe plutôt que de se mesurer à l’élite de leur pays voire leur continent comme Deivid Washington, attaquant des U21 de Chelsea. Difficile de mesurer les ambitions que peut avoir ce Brésil-là, mais il convient de se souvenir qu’en 2023, la bande à Ramon Menezes avait déjoué les pronostics lors du tour final en s’imposant sur le fil, glanant son premier titre depuis la génération Neymar.
L’autre géant du groupe s’annonce comme l’un des favoris de la compétition. Oublié les ratés de l’ère Mascherano, place désormais à Diego Placente qui connait parfaitement les jeunes générations locales, lui qui a dirigé la sélection U15 entre 2017 et 2023 (et avec qui il avait remporté le Sudamericano) puis les U17 depuis 2023. De quoi assurer ce qui n’existait pas jusqu’ici au pays : une continuité. Sous Mascherano, il y avait eu les Alejandro Garnacho, Valentín Carboni, Nico Paz, Luka Romero, Matías Soulé et autre Enzo Barrenechea, il y aura cette année un seul « europibe », Alex Woiski, la machine à buts des équipes de jeunes de Mallorca. Mais il ne sera cependant pas celui vers qui tous les regards se tourneront. Les Européens observeront sans doute de plus près le nouveau « joueur » de City, Claudio Echeverri, les autres se tourneront sur l’élégance de Franco Mastantuono ou les autres grandes promesses de River, club le plus représenté dans le groupe de Diego Placente, Agustín Ruberto et Ian Subiabre. Cette albiceleste regorge de talents à chaque ligne et pourra clairement viser le titre.
Reste que ce groupe compte deux énormes usines à fabriquer des talents. À commencer par la Colombie qui s’est hissé en Coupe du Monde de la catégorie lors de quatre des cinq derniers Sudamericano et qui sort d’une préparation plutôt réussie même si la blessure de dernière minute de Joel Canchimbo peut perturber les plans du sélectionneur César Torres. Il reste tout de même quelques talents à suivre de très près dans ce groupe, deux notamment à l’avant, le « Strasbourgeois » Óscar Perea, que les fans du RCSA seront ravis de voir enfin jouer, et l’autre ailier du DIM, Jhon Edwin Montaño qui, avait été « invité » à s’entraîner avec Aston Villa avant d’être acheté par le City Group pour une bouchée de pain afin d’être prêté à Lommel pour aller découvrir la redoutable deuxième division belge. Autres éléments à surveiller, le gardien Alexei Rojas, né en Angleterre d’un père colombien et d’une mère russe, et qui était déjà présent dans le groupe en 2023, et les deux milieux Jordan Barrera et Kener González qui s’annoncent comme pouvant être de redoutables armes offensives. Les jeunes Cafeteros initient ainsi un nouveau cycle avec à leur tête un sélectionneur sans grande expérience du très haut niveau, mais qui reste sur une excellente dynamique depuis sa prise de fonction, sa sélection demeurant invaincue. À elle de poursuivre dans un tel groupe.
Enfin, le dernier danger du groupe se nomme Équateur. Nous n’allons pas rejouer le couplet de l’importance prise par ce pays dans le paysage footballistique sud-américain depuis quelques années tant chez les A que chez les jeunes, tant sur le plan des sélections que des clubs. Mais cela permet de rappeler que désormais, lorsque la Tri se présente à une compétition, elle fait obligatoirement partie des candidats mais surtout, nourrit de grandes ambitions. La catégorie U20 ne déroge pas à la règle après une victoire en 2019 avant un podium mondial qui suivait une seconde place en 2017. Et comme pour effacer l’échec de 2023, la version 2025 arrive au Venezuela solidement armée. Avec huit membres actuels d’Independiente del Valle, la miniTri s’arme de quelques anciens U17 huitièmes de finaliste mondiaux de la catégorie en 2023 (éliminés par le Brésil d’Estevão) déborde de talents, s’offrant le luxe de pouvoir aligner ses meilleurs espoirs. Ainsi, l’heure sera pour certains de découvrir les Justin Lerma, Keny Arroyo et autre Allen Obando dans une formation au potentiel offensif totalement dingue d’autant qu’elle y adjoint enfin Kendry Páez. S’il est un épouvantail dans ce groupe de la mort, il semble bien porter le maillot de l’Équateur.