OnzeMondial
·23 Mei 2025
EXCLU - Kays Ruiz : « Je ne referai plus les erreurs de mon passé »

OnzeMondial
·23 Mei 2025
Ancien grand espoir du football français et du Paris Saint-Germain, Kays Ruiz a touché le fond. Après des passages ratés au FC Barcelone et à l’AJ Auxerre, le natif de Lyon a connu le chômage avant de retrouver un club. Désormais au Royal Francs Borains, l’ancien chouchou de Neymar s’est refait une santé. Dans le viseurs de nombreux clubs, le meneur de jeu explique sa rédemption. Interview.
Comment on se retrouve du Paris Saint-Germain de Neymar, Mbappé et consorts à jouer le maintien en deuxième division belge ?
J'ai fait des mauvais choix, j’ai mal orienté ma carrière. Je me suis retrouvé en D2 belge pour rebondir. Pour le moment, le plan fonctionne, je suis en capacité de rebondir, on verra ce que l’avenir me réserve.
Que s’est-il passé depuis ton départ du PSG ?
Après le PSG, je me suis tout simplement trompé. J’ai signé au FC Barcelone, c’était une erreur. J’aurais dû prolonger au PSG. J’ai passé une mauvaise saison à Barcelone, et ensuite, j’ai rejoint l’AJ Auxerre.
Quel a été le problème à Barcelone ?
À Barcelone, les dirigeants m'avaient promis des choses qu'ils n'ont pas respectées. J’étais jeune, j’avais un mauvais entourage, j’ai mal réagi, j’ai pété les plombs, et le club a résilié mon contrat.
Quelles étaient les promesses non tenues ? Pourquoi as-tu pété les plombs ?
Au début, j'étais avec l'équipe première. Après, j'ai eu le Covid. Quand j'ai eu le Covid, ils m'ont envoyé en réserve. Ils m’ont ensuite dit : « Tu vas rester toute la saison en réserve ». Et ce n'étaient pas les conditions du contrat. Et quand je te dis que j’ai pété les plombs, je fais références à mon mauvais entourage de l’époque. J’ai été mal influencé, notamment dans les sorties, dans les filles, des petites bêtises de jeunesse. Le Barça a ensuite mis fin à mon contrat au bout d’un an, alors que j’avais un contrat de trois ans.
Tu signes ensuite à Auxerre.
Oui, je rebondis à Auxerre. Jean-Marc Furlan me veut, je signe directement. Au début, tout se passe bien. Je joue même un match avec lui. Il se fait ensuite licencier. Christophe Pélissier prend sa place. Et avec Pélissier, j’avais un antécédent. Lorsque j’étais au PSG, je devais être prêté à Lorient, et à ce moment-là, il était coach de Lorient. Et il s’était opposé à mon prêt, il ne voulait pas. Du coup, dès qu’il est arrivé à Auxerre, il me dit : « Avec moi, tu ne joueras pas ». J’ai essayé de comprendre, mais lui m’a répondu : « C’est mort, il n’y a rien à comprendre, tu ne joueras pas ». Il m’a envoyé en réserve, parfois j’y allais, parfois, je n’avais pas envie. J'étais jeune, je faisais des conneries, je n’allais pas aux entraînements. En fin de saison, on a résilié notre contrat avec Auxerre. Je voulais jouer en Ligue 1 à Auxerre, le projet n’était pas de renforcer la réserve de l’AJ Auxerre. Je devais rebondir en Ligue 1, mais Pélissier en a décidé autrement. J’ai donc dû partir.
Pourquoi n’as-tu pas joué durant la saison 2023/2024 ?
Je suis resté sans club. Cette saison-là, je m'entraîne, je me tiens prêt, mais aucune opportunité ne s’offre à moi. Je pars en Italie, dans un club de Serie C, je m'entraîne avec eux, tout se passe bien, les dirigeants veulent me faire signer. Mais c'est trop juste niveau timing. Du coup, ça ne se fait pas. Et l’été dernier, je rejoins le Royal Francs Borains en Belgique.
Ça n'a pas été difficile d'accepter de rejoindre un club comme le Royal Francs Borains ?
Au début, c'est difficile, mais quand tu vois ton parcours et ta dynamique, tu es obligé d'accepter pour rebondir. Et quand tu sais ce que tu veux, tu es obligé.
Tout le monde te voyait plus haut, tu n’as pas de regrets ?
Parfois, j’ai des petits flashbacks. Je me dis : « Je devrais être au PSG ou dans un autre club à jouer en Ligue 1 ou en Ligue des Champions ». Mais c’est la vie, tu connais des hauts et des bas, il faut surmonter ces épreuves-là et rester fort.
Et comment surmonter ces épreuves ?
Déjà, mentalement, au début, c'est compliqué. Je ne te mens pas, j'ai pleuré des fois. Quand j'étais sans club, je pleurais. Je me disais : « Je me retrouve en galère alors que j'avais un avenir prometteur ». L’entourage est important aussi, il compte beaucoup psychologiquement. Et puis, il faut bosser.
De qui parles-tu quand tu dis : « mon entourage » ?
Déjà ma mère. Ma mère me répétait : « Ne lâche rien, ce sont des épreuves de la vie, tu vas les surmonter ». Mon oncle m'a beaucoup aidé aussi. Ma sœur et Yacine (Adli) aussi m'ont beaucoup soutenu durant cette période. Tout le monde me disait : « Tu vas rebondir ». Et pour le moment, c'est ce que je suis en train de faire.
Comment expliques-tu tes erreurs ?
J'étais jeune, j'étais insouciant. Je ne voyais pas le danger, je n’écoutais personne. Je croyais tout connaître, alors que je ne connaissais rien du tout à la vie. Quand on me disait : « Allez, viens, on va là-bas », j'y allais. Je me mélangeais trop. Je n’écoutais personne. Je n’en faisais qu'à ma tête. Alors que je ne connaissais rien à la vie.
Tu regrettes ?
Oui, je regrette certaines choses même si j’ai appris. Si je n’avais pas vécu ces choses-là, j'aurais continué dans mes travers et je n'aurais pas gagné en maturité. Aujourd’hui, je me dis : « Tu as pris une bonne claque quand tu étais jeune, c’est une bonne chose, maintenant, il faut aller de l’avant ».
Tu n’avais plus le choix en signant au Royal Francs Borains, c'est ça ?
Grave ! À ce moment-là, je me dis : « C’est maintenant ou jamais. C'est le moment ». Je voulais juste jouer au football et kiffer, je voulais faire ce que j’aime.
Tu connais des débuts difficiles au Royal Francs Borains…
Au début, c'était un peu compliqué avec le coach. Je n’avais pas beaucoup de temps de jeu, il a ensuite été licencié. L’adjoint a repris l’équipe et m’a fait confiance. Karim Belhocine a ensuite été nommé. Il m’a directement fait confiance et je lui ai rendu sur le terrain. J’ai pu enchaîner les stats. J’ai eu de bonnes stats. Sur un match, je me suis sacrifié pour mon équipe en prenant un rouge, le joueur allait au but, j’étais obligé de faire faute. Cette suspension est mon seul regret de la saison.
Tu sors d’une belle saison en Belgique, ça fait quoi d’être redevenu un footballeur à part entière ?
Ça redonne le sourire. C'est ce qui me manquait le plus dans ma vie. C'est mon métier, c'est ce que j'aime faire. Pour moi, le football a toujours été un plaisir. Et si tu m'enlèves le football, je ne peux rien faire d’autre. J’ai enchaîné les matchs, j’ai repris mes sensations, je bosse aux entraînements, en dehors des entraînements, et je me sens de mieux en mieux.
Quel était l’avis général à ton sujet : entraîneurs, coéquipiers, adversaires ?
Mes coéquipiers étaient contents, mon coach aussi. Mes adversaires se moquaient de mon passé, ils me disaient : « Tu es passé du PSG à Francs Borains ». Mais c’est le jeu, tu dois faire abstraction de tout ça. Je leur montrais sur le terrain. Ça me faisait rire, le plus important, c’était que dans mon club, tout le monde était satisfait de mon niveau et de mon état d’esprit. Dans l’ensemble, tout s’est bien passé. J’ai bien été éprouvé, je n’ai pas lâché. Je ne te mens pas, avant, j’aurais craqué. Mais là, c’était clair dans ma tête : il était impossible pour moi de faire une nouvelle erreur. J’avais mon truc en tête : faire mon job et ne pas me faire remarquer négativement.
Quand tu rentrais à la maison, comment ça se passait mentalement ?
Quand je rentrais à la maison, je regardais les matchs et je me disais : « Normalement, je dois être là où les gens m’attendaient ». Mais bon, c’est comme ça. C'est un mal pour un bien.
Il te reste un an de contrat au Royal Francs Borains, quel est l’objectif ?
L'objectif, normalement, c'est de quitter le club sous forme de transfert si tout se passe comme prévu. On verra où j’irai. Pour moi, le plus important, c'est le projet sportif. Peu importe que ce soit en France, en Belgique ou en Allemagne. Des clubs se sont manifestés, on attend l’ouverture du mercato pour prendre la meilleure décision.
Quel est le positionnement du Royal Francs Borains ?
Ils sont ouverts à un départ. C'était le deal entre nous, que je fasse un an et que je parte sous forme de transfert.
Tu as une anecdote sur la saison que tu viens de passer ?
J'en ai une avec Radja Nainggolan. Pendant tout le match, il me faisait des fautes, il m’insultait. Avant, j’aurais sûrement répondu, mais là, je ne le calculais pas. Et à un moment, il m’a fait une grosse faute et il a insulté ma mère. Je n’ai pas craqué, je suis resté dans mon match, je trouve que ça représente bien mon nouvel état d’esprit. Je suis focus sur ce que j’ai à faire.
Et au niveau footballistique ?
Avant, j'étais un joueur qui ne défendait pas, mais là, avec Karim Belhocine, j’ai bien progressé. Il m’a appris à défendre, il m’a appris à courir, à enchaîner les kilomètres, je fais 11/12 kilomètres par match. Et offensivement, il me laissait libre, il me demandait d’être créatif. J’ai pris goût à l’effort.
Tu étais utilisé dans quel registre ?
On évoluait en 4-2-3-1. Il m'utilisait en numéro 10 à l’ancienne, j’étais un électron libre. Par contre, il était intransigeant sur les retours défensifs.
Tu te sens mieux où sur le terrain ?
Je suis capable d’évoluer ailier gauche, numéro 8 ou numéro 10. J’ai cette particularité, je peux m’adapter sur trois postes différents, je pense que c’est un bel atout.
Quel est le plus grand moment de ta carrière ?
Le moment fort de ma carrière, c’est la finale de la Ligue des Champions contre le Bayern, avec le PSG. J’étais en tribune, mais j’étais avec l’effectif, j’étais sur le banc contre l’Atalanta. Je n’oublierai jamais ces moments. J’ai côtoyé Neymar, Kylian Mbappé et les autres, ils m’ont donné beaucoup de conseils. Neymar me disait toujours : « Joue comme tu sais jouer », « N’aie pas peur de tenter des choses, fais parler ta technique ». Kylian (Mbappé) me répétait toujours : « Prolonge ton contrat avec le PSG » (sourire). Tuchel m’a beaucoup aidé aussi, il me parlait des retours défensifs, mais quand tu es à Paris, tu ne fais pas de retours défensifs, tu as toujours la possession du ballon.
Tu as été médiatisé très jeune, comment as-tu vécu cette mise en lumière ?
Je faisais abstraction, je ne calculais pas, je ne regardais pas tout ça. C’est mon oncle Raouf qui s’occupait de ça. Je ne faisais pas attention, je sais que ces choses-là peuvent te mettre un coup mentalement, donc je ne regarde pas. Par exemple, j’ai du monde sur les réseaux sociaux, mais je ne gère pas mes comptes. Je regarde de temps en temps ce qu’il se passe, mais je préfère avoir du recul.
Tu es encore en contact avec les joueurs que tu as croisés ?
Le seul avec qui j’ai quelques contacts, c'est Neymar. Et je parle encore avec ceux de ma génération. Sinon les autres professionnels, non.
Ça fait quoi de voir les joueurs de ta génération évoluer en Ligue 1 ?
Il y a Kalimuendo et Pembélé en 2002, Xavi Simons en 2003. Ça fait plaisir, je suis content pour eux. Je n’envie pas les gens, s’ils sont là, c’est qu’ils le méritent.
Qui aimerais-tu être durant la suite de ta carrière ?
J’ai envie d’être le Kays Ruiz que tout le monde a connu, et retrouver la scène européenne. Je me vois dans deux-trois ans dans un top club européen. Je veux être un joueur technique, avec la classe sur le terrain, qui sait dribbler, important dans la dernière passe. Dans un groupe, je pourrais apporter ma joie de vivre et mon envie de me battre. Je n’ai jamais causé de tort dans un vestiaire. Je ne vais pas mentir, avant, j’avais un comportement de gamin par moments, mais aujourd’hui, avec tout ce que j’ai vécu, j’ai pris en maturité. Je ne referai plus les erreurs de mon passé. Je n’ai plus le droit à l’erreur, c’est ma dernière chance.
Tu n’as pas la pression de savoir que c’est ta dernière chance ?
Non, je n'ai pas la pression parce que je sais où je veux aller. Le football, c'est mon plaisir et mon travail. Je n'ai pas envie de décevoir les personnes qui m’entourent. Je vais bien faire les choses, aucun doute là-dessus.
Tu n'as jamais eu peur que tout s'arrête ?
Si, pendant mon année sans club. Je me disais : « C'est fini ». Grâce au soutien de ma famille et de mon entourage, j’ai gardé espoir. Ils me rassuraient et me motivaient. Ça me remontait le moral, et j’ai pu retrouver un club, Dieu merci. Car franchement, si on m’avait dit : « Tu dois trouver un travail », ça aurait été difficile. Je pense que je serais tombé dans une dépression.
Tu as redouté ce moment ?
Non, je n’ai pas eu peur de ça parce que je connais mon football et je sais ce que je peux faire. Je me disais : « Si une chance se présente, je vais la saisir et ça va repartir ».
Comment se passe ton quotidien ?
Après le foot, je rentre à la maison, j’habite avec ma mère. Du coup, je mange, je fais ma sieste, je joue un peu à la play. Ma mère est venue habiter avec moi en Belgique. Comme ça, je garde un vrai équilibre. J'ai toujours été son petit bébé. Elle a peur pour moi, que je retombe dans mes travers d’avant, avec les mauvaises fréquentations. Du coup, elle préfère rester à côté de moi. Et pour moi, c'est plus simple. C'est ma maman, on n'en a qu'une seule. Et elle sait comment s'occuper de moi. Maintenant, elle ne me lâche plus (rires).
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